Conduire sous CBD constitue désormais une infraction
Peu importe la dose absorbée, la conduite après usage de THC est prohibée. Il en va de même pour celle après usage de CBD, a estimé la Cour de cassation dans un arrêt du 21 juin 2023. Même si la substance est légalement commercialisée et à faible teneur en THC.
Consommer du CBD ou conduire, il faut désormais choisir. Dans cette affaire, un conducteur est poursuivi pour usage de stupéfiants et excès de vitesse. Le 21 janvier 2021, le tribunal correctionnel du Havre le condamne à deux mois d'emprisonnement avec sursis, à six mois de suspension du permis de conduire, ainsi qu'à 50 € d'amende.
Le conducteur décide de faire appel au motif notamment que sa consommation de CBD contenait du THC à une teneur inférieure à la limite réglementaire, soit 0,20 % au moment des faits (aujourd’hui 0,30 %).
Le CBD, substance "dépourvue de propriétés stupéfiantes"...
La question qui se pose est de savoir si le CBD présente des risques, notamment sur la conduite. Dans une décision rendue le 29 décembre 2022, le Conseil d’État a précisé que les effets du CBD ne sont en rien équivalents à ceux du THC : "le CBD ne présente pas de propriétés psychotropes et il ne comporte pas les mêmes effets indésirables que le delta 9-tétrahydrocannabinol (THC), identifié comme le principal composant psychoactif du cannabis susceptible notamment de faire naître un effet de dépendance. Il en résulte que des variétés de cannabis dépourvues de propriétés stupéfiantes peuvent être distinguées en raison de leur faible teneur en delta-9-tétrahydrocannabinol."
La cour d’appel de Rouen relaxe le conducteur au motif, d’une part que "l'expertise toxicologique qui en fait état, ne mentionne pas de taux de THC, et qu'en outre, aucune investigation n'a été menée afin de savoir si le CBD consommé par l'intéressé dépassait ou non la teneur admise en tétrahydrocannabinol, fixée à moins de 0,20 % à la date des faits".
... mais "sans incidence sur l'incrimination de conduite après usage de stupéfiants"
La Cour de cassation n'est pas de cet avis. Elle casse et annule la décision des juges du fond, estimant que "l'autorisation de commercialiser certains dérivés du cannabis, dont la teneur en delta 9 tétrahydrocannabinol, substance elle-même classée comme stupéfiant […], n'est pas supérieure à 0,30 %, est sans incidence sur l'incrimination de conduite après usage de stupéfiants, cette infraction étant constituée s'il est établi que le prévenu a conduit un véhicule après avoir fait usage d'une substance classée comme stupéfiant, peu important la dose absorbée".
La Cour de cassation ne remet pas en cause la légalité de la commercialisation du CBD, mais rappelle que l’article L.235-1 du code de la route incrimine le seul fait de conduire après avoir fait usage de stupéfiants, cet usage étant établi par une analyse sanguine ou salivaire. Ainsi à partir du moment où le CBD entraîne la présence de traces de produits stupéfiants, sa consommation est incompatible avec la conduite.
© Lefebvre Dalloz