Emploi des seniors : les entreprises doivent anticiper le recul de l'âge de départ à la retraite
Le 15 mars dernier, Catherine Millet-Ursin, avocate associée au sein du cabinet Fromont Briens, et Françoise Kleinbauer, PDG de France Retraite, ont organisé un webinaire sur l'impact RH de la réforme des retraites. L'occasion de rappeler aux entreprises l'importance de s'occuper de l'emploi des seniors dès à présent, que la réforme des retraites soit adoptée ou non.
 
                            Alors que l'on saura aujourd'hui si le PLRFSS est bien adopté sans vote à l'Assemblée nationale, à la suite du dépôt de motions de censure de l'opposition, Catherine Millet-Ursin, avocate associée au sein du cabinet Fromont Briens, et Françoise Kleinbauer, PDG de France Retraite ont souligné que - réforme adoptée ou non - la question du maintien des seniors en emploi se pose face aux difficultés de recrutement grandissantes des entreprises et au manque croissant de savoir-faire disponibles sur le marché du travail. "L'entreprise va être au coeur de cette problématique qui va être d'anticiper ce qui va se passer dans les années qui viennent, qu'il y ait ou non un décalage de l'âge de départ", observe Françoise Kleinbauer. "Dans certains métiers, on va avoir besoin de maintenir les seniors en emploi. Décaler l'âge de départ en retraite va être presque une opportunité pour certaines entreprises et certains métiers où, globalement, on a du mal à recruter ou à faire évoluer les personnes vers des jobs aujourd'hui en tension".
Mesurer les effets du décalage de l'âge de départ en retraite
La responsable de France Retraite insiste sur la nécessité de mesurer les impacts indirects de l'éventuel décalage de l'âge de départ à la retraite. Sur les indemnités de départ à la retraite d'une part. "Les rémunérations vont peut être augmenter ainsi que l'ancienneté de ces salariés ; c'est un point à mesurer". Sur les régimes de protection sociale d'autre part. "Tout ce qui touche à la protection sociale va nécessairement avoir un coût augmenté car il va falloir couvrir des personnes qui vont présenter un risque plus important en termes de décès et d'arrêt de travail". Enfin, les dispositifs d'accompagnement des seniors vont également être affectés. "Il faudra imaginer d'autres dispositifs de transition entre l'emploi et la retraite".
Il existe aujourd'hui en entreprise de nombreux dispositifs assurant la transition entre l'emploi et la retraite : congé de fin de carrière, retraite progressive, temps partiel aidé, CET, rachat de trimestres", énumère Françoise Kleinbauer. "Beaucoup d'entreprises qui ont de tels dispositifs se posent la question de ce qu'elles doivent faire à la veille de cette réforme, comment elles doivent se préparer aux conséquences liées au déclage de l'âge de départ à la retraite".
Distinguer le stock du flux
"La premier chose à faire, recommande-t-elle, est de distinguer le stock et le flux. Le stock ce sont les salariés qui ont déjà un pied dans le dispositif mais ne sont pas encore partis à la retraite. Le risque est que leur départ en retraite soit décalé. Le flux vise les personnes qui n'ont pas encore activé ces dispositifs ce qui peut être plus simple à gérer. Il convient de clarifier et de chiffrer les pistes envisageables. Pour le flux, souhaite-t-on maintenir ou non les dispositifs ? Dans les mêmes conditions ? Les salariés n'ayant pas encore adhéré, l'entreprise a des possibilités pour adapter facilement les dispositifs prévus. Pour le stock, on est dans une situation complètement différente. Les personnes ont déjà un pied dedans. Si l'âge est décalé et que l'entreprise ne fait rien, quelles en seront les conséquences financières ? Il a falloir chiffrer le maintien des disositifs en l'état avec le décalage de l'âge de départ en retraite".
"Dans un deuxième temps, il faut regarder si on a d'autres solutions car l'accord prévoit peut être une clause de revoyure (si jamais les conditions réglementaires changent par exemple), qui permet de revoir la manière dont vont être définis les dispositifs et voir ce que l'entreprise est prête à changer et ce qui peut être acceptable".
"Il conviendra toutefois d'être attentif aux différences de traitement entre deux populations", met en garde Fraçoise Kleinbauer.
© Lefebvre Dalloz