Gérald Darmanin annonce le changement dans la continuité
Dans une lettre adressée aux magistrats et aux agents, Gérald Darmanin annonce un nouveau jeu de réformes, dans la continuité de celles initiées ces dernières années : CRPC criminelle, numérisation, déjudiciarisation, filtrage de l’appel, … Le garde des Sceaux veut également simplifier les sanctions pénales, avec une peine de probation large, et instaurer des peines minimales.
S’inspirant des rapports des trois missions lancées par son prédécesseur Didier Migaud qui ont fait une centaine de propositions, Gérald Darmanin annonce vouloir « ne pas proposer un grand plan ou une n-ième grande réforme pour la Justice » mais « remettre du bon sens, de l’efficacité concrète et de la rapidité dans le système judiciaire ».
Une nouvelle réforme de la procédure civile
Pour simplifier la justice civile, le ministre veut, dans la lignée des mesures prises ces dernières années, réformer la mise en état et imposer une phase amiable préalable obligatoire. Il souhaite que le coût du procès civil « soit mis à la charge de la partie perdante » et une nouvelle étape de déjudiciarisation concernant l’adoption ou les successions vacantes. Un filtrage de l’appel devrait être mis en place.
Le ministre souhaite que le portail Justice.fr permette de suivre en temps réel l’avancée du dossier. Une mesure annoncée depuis près de dix ans, mais qui butte sur les retards informatiques systémiques du ministère. Par ailleurs, l’anonymisation des noms des magistrats et greffiers dans les décisions publiées en open data, devrait être généralisée.
Plaider-coupable criminelle et peine de probation
En matière pénale, face à l’embolie, le ministre annonce l’engagement immédiat d’une concertation sur un plaider-coupable criminelle. Cette procédure, déjà évoquée au moment des débats sur la loi narcotrafic, devra garantir la place de la victime et les droits de la défense. Elle n’était pas préconisée par la mission d’urgence, qui propose plutôt d’adapter l’audience quand les faits sont reconnus. Il n’est pas envisagé de revenir sur les cours criminelles départementales, même si elles peuvent être améliorées.
Le ministre veut également simplifier l’échelle des peines pour passer de 200 à 4 : emprisonnement (sans sursis), peine de probation, amendes et jours-amende et enfin, comme quatrième bloc, peines d’interdiction ou d’obligation. Sur le modèle de la réforme Taubira proposée il y a dix ans, la peine de probation engloberait le sursis mis à l’épreuve, le travail d’intérêt général et différents aménagements de peine. La probation et l’amende devront être privilégiées par rapport à la prison, mais une violation devra entraîner une incarcération immédiate. Le ministre souhaite aussi l’instauration de peines minimales, un projet pour l’instant flou.
Dans la lignée des réformes récentes, le ministre veut dynamiser les saisies et confiscation. Il envisage que les personnes condamnées remboursent à l’État les frais d’enquête et de justice et veut améliorer le recouvrement des amendes pénales, envisageant de passer par les commissaires de justice.
Sur la surpopulation pénale, le ministre ne souhaite pas de mécanisme de libération automatique, contrairement au rapport de la mission remis en mars. Les États généraux de l’insertion et de la probation devront plancher sur l’implication des SPIP en pré-sentenciel, le renforcement des TIG et des semi-libertés. Gérald Darmanin veut aussi engager une concertation sur les régimes de détention différenciés, où la lourdeur de la surveillance évoluerait en fonction du profil du détenu. Une réforme qui bute toutefois sur la surpopulation, qui enlève toute marge de manœuvre à l’administration pénitentiaire.
Lettre du ministre de la Justice aux magistrats et agents travaillant en juridiction, 11 mai 2025
© Lefebvre Dalloz