Le juge et les modalités de régularisation d’une déclaration d’utilité publique
L’office du juge s’affine sur les modalités de régularisation d’un vice affectant une déclaration d’utilité publique mais également sur le contrôle du juge de cassation.
Le Conseil d’État complète sa jurisprudence Commune de Grabels qui autorise le juge administratif, lorsqu’un vice de procédure affecte un arrêté déclarant d’utilité publique des travaux, à surseoir à statuer pour permettre la régularisation du vice jusqu’à l’expiration du délai qu’il fixe pour cette régularisation (CE 9 juill. 2021, n° 437634, Lebon
; AJDA 2021. 1471
; AJDI 2022. 425, chron. S. Gilbert
; RDI 2021. 537, obs. R. Hostiou
; RFDA 2021. 932, concl. S. Roussel
; RTD eur. 2022. 286, obs. L. de Fournoux
; CE 21 juill. 2022, n° 437634, Dalloz actualité, 13 sept. 2022, obs. J.-M. Pastor ; Lebon avec les concl.
; AJDA 2022. 1533
; AJDI 2023. 256, chron. S. Gilbert
; RDI 2022. 574, obs. R. Hostiou
; AJCT 2023. 63, obs. J. Béal-Long
; ibid. 353, étude M.-C. Rouault
; RFDA 2022. 840, concl. P. Ranquet
). Il peut préciser, par son jugement avant dire droit, les modalités de cette régularisation, qui implique l’intervention d’une décision prise par l’auteur de l’arrêté et valant mesure de régularisation du vice dont est entaché l’arrêté. Si la régularisation intervient dans le délai fixé, elle est notifiée au juge, qui statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations.
Le juge souverain sur les modalités de régularisation
La Haute juridiction précise que l’appréciation du juge administratif, « tant sur le caractère régularisable du vice que sur la mise en œuvre de ce pouvoir ou sur la fixation du délai pour procéder à cette régularisation est souveraine, sous réserve du contrôle par le juge de cassation de l’erreur de droit et de la dénaturation. Le juge peut préciser, par son jugement avant dire droit, les modalités de cette régularisation, qui implique l’intervention d’une décision prise par l’auteur de l’arrêté et valant mesure de régularisation du vice dont est entaché l’arrêté ».
Contrôle du juge de cassation sur l’ensemble des moyens soulevés
Pour autant, si le Conseil d’État, juge de cassation, annule l’arrêt attaqué en tant qu’il rejetait les conclusions tendant à ce qu’il soit sursis à statuer, il lui appartient d’examiner le bien-fondé des autres moyens des demandeurs de première instance qui n’ont pas été accueillis par les juges du fond.
En l’espèce, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a jugé qu’un arrêté de DUP sur un projet de portion routière était entaché d’un vice tenant à l’insuffisance de l’étude économique et sociale s’agissant des modalités de financement du projet. Il ne s’est ainsi prononcé que sur ce moyen pour annuler l’arrêté de DUP. La Cour administrative d’appel de Versailles a rejeté l’appel formé par le département du Val-d’Oise contre ce jugement en se prononçant également sur ce seul moyen. Dès lors, il appartenait au Conseil d’État, « avant de rechercher si cette illégalité est susceptible d’être régularisée et, le cas échéant, de préciser avant dire droit les modalités d’une régularisation, de se prononcer sur le bien-fondé des autres moyens qui avaient été invoqués par les demandeurs de première instance et sur lesquels la cour administrative d’appel ne s’est pas prononcée ». Statuant comme juge d’appel, la Haute juridiction considère que la mention dans l’évaluation économique et sociale des conditions de financement du projet, portée à la connaissance du public, étaient de nature à régulariser les insuffisances de l’étude s’agissant des modalités de financement du projet. L’illégalité entachant l’élaboration de la DUP en litige était susceptible d’être régularisée par une décision du préfet du Val-d’Oise confirmant l’utilité publique du projet, qu’il devra à nouveau apprécier après réalisation par le département du Val-d’Oise d’une analyse des conditions de financement du projet conforme à l’article R. 1511-4 du code des transports, le cas échéant par la mention dans l’évaluation économique et sociale d’un financement de l’intégralité du projet par le département sur ses fonds propres et la mise en œuvre d’une information et participation du public.
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