Le Sénat au secours de la purge des nullités

En septembre 2023, le Conseil constitutionnel avait censuré l’article prévoyant le mécanisme de purge des nullités en matière correctionnelle. Après avoir longtemps procrastiné, le gouvernement a décidé de soutenir une proposition de loi sénatoriale pour sauvegarder le mécanisme.

Depuis près d’un an, le mécanisme de purge des nullités est en sursis. Si l’article 385 du code de procédure pénale donne compétence au tribunal correctionnel pour constater les nullités des procédures, lorsque l’audience de jugement succède à une phase d’instruction, l’ordonnance de renvoi qui saisit le tribunal couvre les vices de la procédure antérieure (mais pas ses propres imperfections). En septembre 2023, par une question prioritaire de constitutionnalité posée par un ancien candidat à la présidentielle de 2017, le Conseil constitutionnel avait censuré le premier alinéa de cet article (Cons. const. 28 sept. 2023, n° 2023-1062 QPC, Dalloz actualité, 13 oct. 2023, obs. H. Diaz ; D. 2023. 1696, et les obs. ; RSC 2023. 839, obs. A. Botton ; RTD com. 2023. 973, obs. L. Saenko ). En ne prévoyant aucune exception à la purge des nullités dans le cas où le prévenu n’aurait pu avoir connaissance de l’irrégularité que postérieurement à la clôture de l’instruction, le dispositif méconnaît le droit à un recours juridictionnel effectif ainsi que les droits de la défense.

Le Conseil constitutionnel avait prévu que l’abrogation de ce premier alinéa de l’article 385 ne prenne effet qu’au 1er octobre 2024. Dans l’attente, quand un moyen de nullité qui n’a pu être connu avant la clôture de l’instruction, la déclaration d’inconstitutionnalité peut être invoquée dans les instances en cours.

Il est donc nécessaire que le législateur intervienne avant la pause d’été, au risque que le mécanisme de purge des nullités deviennent caduc. Or, avec une session extraordinaire très réduite, du fait des Jeux olympiques, il devenait urgent de déposer un texte de loi. Cela vient d’être fait par les sénateurs François-Noël Buffet (LR, président de la commission des lois) et Philippe Bonnecarrère (Union centriste). Ces derniers ont d’ores et déjà reçu le soutien du gouvernement qui vient de déclarer la procédure accélérée sur leur texte.

L’article premier de la proposition de loi modifie les articles 175 et 385 du code de procédure pénale. Les parties pourront soulever, en matière correctionnelle, le moyen d’une nullité qui « n’aurait pu être connu antérieurement », soit, dès l’avis de fin d’information et jusqu’à l’ordonnance de règlement du juge d’instruction, soit devant le tribunal correctionnel, lorsque la partie n’a pu avoir connaissance de la nullité qu’après la clôture de l’information. Cette possibilité est transposée à l’identique, pour les procédures criminelles (C. pr. pén., art. 181, 269-1 et 305-1) comme pour celles devant le tribunal de police (C. pr. pén., art. 178 et 179).

Le processus législatif promet d’être express. Le sénateur Philippe Bonnecarrère a insisté sur le fait que ce texte était vraiment nécessaire. Les deux sénateurs ont d’ailleurs échangé au préalable avec la Chancellerie, pour s’assurer de la qualité du texte. La dissolution de l’Assemblée nationale va bousculer le calendrier prévu. Mais le texte devrait être adopté lors de la session extraordinaire, cet été, afin d’être opérationnel avant le 1er octobre.

 

Proposition de loi visant à sécuriser le mécanisme de purge des nullités, 4 juin 2024

© Lefebvre Dalloz