Les stratégies d'économie circulaire doivent inclure la supply chain

La mise en place d'un processus de supply chain circulaire est nécessaire pour la pérennité économique et environnementale des entreprises. C'est le sujet auquel s'est intéressée une table ronde lors du salon Produrable à Paris. Voici quelques clés pour agir.

La supply chain, traduisible par chaîne logistique, notamment en amont, correspond aux différentes étapes liées à la chaîne d’approvisionnement (supply signifie fournir), de l’achat des matières premières à la livraison d’un composant ou d’un produit. Elle représente tous les intervenants qui œuvrent pour garantir et optimiser la production et elle est responsable d’émissions de gaz à effet de serre, entre autres du fait des transports.

L’économie circulaire, quant à elle, permet de produire des biens et des services de manière durable en limitant la production de déchets. Elle repose sur des boucles positives et prône l’usage plutôt que la possession du bien.

À l’occasion du salon Produrable, qui s’est déroulé les 12 et 13 septembre dernier à Paris, une table ronde est revenue sur le sujet de la « supply chain, quand la circularité réinvente les modèles ». Plusieurs intervenants ont ainsi expliqué le changement de société qu’implique l’économie circulaire et la transformation radicale et nécessaire des modes de production dans l’industrie.

Le passage du linéaire au circulaire nécessite des transformations

Pour Thomas Gault, associé expert supply chains durables chez Ernst&Young, cabinet d’audit financier et de conseil, « le passage du linéaire au circulaire engendre des impacts sur toutes les étapes » (flux, circuits, modèles d’affaires, etc.), y compris sur la supply chain.

L’économie circulaire permet « d’assurer la pérennité économique des entreprises » mais nécessite « une équipe dédiée pour mener les projets d’économie circulaire ». Elle doit « améliorer les conditions de ceux qui produisent afin de les faire adhérer aux actions environnementales ».

L’instauration d’une démarche d’économie circulaire au sein d’une industrie doit passer par « une étape de collecte, de réparation, de réinjection dans le circuit et d’invention d’un nouveau circuit de distribution ».

La stratégie des entreprises doit intégrer les objectifs d’économie circulaire

Autre point de vue, celui d’Anaïs Leblanc, directrice de Citwell, cabinet spécialiste de la transformation des entreprises. Elle rappelle que « l’économie circulaire a pour objectif de découpler la croissance de l’usage de la matière et de maximiser l’intensification de l’usage de la matière », en précisant qu’aujourd’hui « 80 % de l’empreinte matière et 75 à 80 % de l’empreinte carbone sont dues à la production / fabrication des produits et services ».

L’idéal de l’économie circulaire sera atteint lorsque « les entreprises feront de la location ou de la mutualisation de matériel afin que les équipements soient plus utilisés chaque année ». Par exemple, Décathlon met déjà en place ce système avec la location de tentes de camping.

Un enjeu de résilience existe au niveau des entreprises au niveau global et international. Pour ce faire, Anaïs Leblanc suggère que « les objectifs d’économie circulaire soient intégrés dans les objectifs stratégiques des entreprises et dans ceux de toutes les BU » (business units, unités commerciales).

Notons que Citwell propose sur son site internet, en partenariat avec l’INEC (Institut national de l’économie circulaire), un plaidoyer à destination de la représentation parlementaire pour permettre le plein déploiement de la supply chain circulaire et accélérer la réindustrialisation verte engagée par le gouvernement.

Formation sur le tri des déchets

Les entreprises de la grande distribution sont particulièrement concernées par les sujets de supply chain et d’économie circulaire. Xavier Pierre, responsable transport, environnement et prévention sécurité au travail logistique chez Lidl France, explique que « les déchets produits par les supermarchés sont récupérés par les camions qui livrent afin qu’ils ne reviennent pas à vide ». D’autres actions de supply chain circulaire sont déployées par le groupe (comme dans d’autres entreprises du secteur) :

  • la mise en place de méthanisateurs pour faire du gaz pour les camions à partir des biodéchets ;

  • l’achat de 150 camions fonctionnant au biogaz sur la flotte de 600 camions au total ;

  • la massification des déchets dans les plateformes logistiques ;

  • la réutilisation des cartons pour en faire des ceintures utilisées autour des palettes. Cela passe par un travail direct avec les papeteries afin de privilégier le « sans intermédiaire » ;

  • la transformation des déchets de pain en farine animale. Là aussi, un travail direct avec l’usine de transformation du pain en farine animale est mis en œuvre ;

  • la revalorisation de 80 % des déchets plastiques.

Pour Xavier Pierre, « l’économie circulaire concerne toutes les strates de l’entreprise ». C’est pourquoi Lidl met en place une formation de tous ses collaborateurs sur le tri des déchets. Le but est qu’ils réalisent ensuite un tri des déchets le plus efficace possible en vue d’une valorisation dans les bonnes filières.

Restaurer des écosystèmes à l’intérieur des chaînes d’approvisionnement

Dernier retour d’expérience, celui d’Alexandre Schouler, directeur général de PUR Projet, entreprise de conseil en environnement créée en 2008. PUR propose le développement de projets qui visent à restaurer des écosystèmes à l’intérieur des chaînes d’approvisionnement des entreprises. Ce travail est essentiellement réalisé auprès de grandes entreprises afin de les accompagner dans leurs stratégies climat et leurs transitions agroécologiques de l’agriculture.

Alexandre Schouler revient sur l’exemple du partenariat entre PUR et l’entreprise Nespresso. Depuis 2014, « plus de 5 millions d’arbres ont été plantés en agroforesterie ». L’objectif était de « régénérer le milieu ». Sans aucune action de la part de Nespresso, les rendements de café sur leurs exploitations auraient diminué de 50 % d’ici 2050.

 

© Lefebvre Dalloz