Loi renforçant la sécurité des élus locaux : je préviens, je protège et j’informe
Pour parvenir à assurer la protection des maires et des autres élus locaux face aux violences, la loi du 21 mars 2024 renforce la répression des infractions commises contre les élus, facilite la mise en œuvre de la protection fonctionnelle et améliore la communication entre les élus et les autorités judiciaires.
La violence contre les élus est un phénomène de société qui, faute d’être nouveau, semble malheureusement de plus en plus commun. En 2023, plus de 1 400 faits de violence contre des élus, tant physique que verbale, ont été recensés (Sénat, Rapp. n° 7, 5 oct. 2023, p. 6). Outre l’atteinte à l’autorité de l’État que constituent les agressions contre ses représentants, ce phénomène conduit à une « érosion des vocations électorales » (ibid.), susceptible de conduire à une véritable crise démocratique. Il ne peut donc laisser indifférents les pouvoirs publics, et plusieurs acteurs institutionnels ont déjà réagi. Ainsi, depuis 2019, le garde des Sceaux a diffusé plusieurs circulaires demandant aux parquets de suivre une politique pénale ferme en matière d’infractions commises contre les élus (Circ. du 6 nov. 2019 relative au traitement judiciaire des infractions commises à l’encontre des personnes investies d’un mandat électif ; Circ. du 7 sept. 2020 relative au traitement judiciaire des infractions commises à l’encontre des personnes investies d’un mandat électif ; Dépêche du 26 janv. 2023 relative au traitement judiciaire des infractions commises à la suite d’appels à procéder à des coupures de courant ciblant des permanences d’élus). En 2019, la promulgation de la loi engagement et proximité (Loi n° 2019-1461 du 27 déc. 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique) a imposé aux communes de souscrire une garantie couvrant les frais de la protection fonctionnelle pour les élus (CGCT, art. L. 2123-34). Un centre d’analyse et de lutte contre les atteintes aux élus (CALAE) a été instauré en mai 2023. En parallèle, des propositions de loi ont été déposées devant les assemblées parlementaires.
En juillet 2023, le gouvernement a présenté un plan national de prévention et de lutte contre les violences aux élus, structuré autour de quatre axes : renforcer la protection juridique et psychologique des élus, renforcer la protection physique des élus, renforcer les mesures judiciaires et renforcer les relations maires-parquets.
Sans parvenir à épuiser ces objectifs, la loi du 21 mars 2024 s’inscrit pleinement dans le plan gouvernemental. En effet, on retrouve un renforcement des mesures judiciaires caractérisé par un durcissement de la répression, ainsi que des dispositions sur la protection fonctionnelle et la communication d’informations avec les autorités judiciaires.
Durcir la répression pour prévenir les infractions
Tablant sur la fonction dissuasive de la peine, le législateur a fait le choix de durcir la répression des infractions commises à l’encontre des élus locaux. Un des procédés utilisés a été de redéfinir certaines circonstances aggravantes. Jusqu’alors, le fait que la victime de violences ait la qualité de personne chargée d’une mission de service public était une circonstance aggravante mentionnée dans différents textes du code pénal (v. par ex., C. pén., art. 222-12, 4° bis, et art. 222-13, 4° bis). Cette circonstance aggravante était listée avec d’autres, prises de la qualité de la victime : magistrat, enseignant, conjoint…
Pour différencier les infractions commises contre les élus locaux, le législateur s’est inspiré d’une disposition de la loi n° 2022-52 du 24 janvier 2022 relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure, qui avait aggravé la répression des violences commises contre les forces de l’ordre. La loi de 2022 a créé un article spécifique (C. pén., art. 222-14-5) pour cette catégorie de victime, qui vaut tant pour les violences légères que celles entraînant une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours. La loi du 21 mars 2024 a ajouté la qualité de titulaire d’un mandat électif public dans cet article, pour aligner le régime des violences commises contre les élus sur celui des violences commises sur les membres des forces de l’ordre. Par conséquent, les violences commises contre les titulaires d’un mandat électif public dans l’exercice ou du fait de leur fonction, quand cette qualité est apparente ou connue, sont réprimées de sept ans d’emprisonnement et de 100 000 € d’amende si elles ont entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours, et de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende si elles ont entraîné une incapacité de travail inférieure ou égale à huit jours ou si elles n’ont pas entraîné d’incapacité de travail. Les peines encourues peuvent monter à dix ans d’emprisonnement et 150 000 € d’amende en présence d’autres circonstances aggravantes figurant à l’article 222-12 du code pénal.
Sur la catégorie de victime prise en compte, on peut relever que la désignation du groupe n’est pas nouvelle. Ainsi, dès 1994, plusieurs articles du code pénal évoquaient les personnes investies d’un mandat électif public en tant qu’élément préalable d’incriminations (v. par ex., C. pén., art. 432-12 et 433-1). On retrouve aussi l’expression « titulaire d’un mandat électif public » utilisée pour désigner la qualité de la victime à l’article 223-1-1 du code pénal, qui réprime la mise en danger de la vie d’autrui par diffusion d’informations. La notion n’est donc pas nouvelle. En revanche, elle ne correspond pas exactement à celle de « personne chargée d’une mission de service public » qui figurait dans les textes d’incrimination des violences. Les personnes chargées d’une mission de service public demeurent donc mentionnées aux articles 222-12 et 222-13 du code pénal à titre résiduel, dès lors qu’elles ne sont pas titulaires d’un mandat électif public. Enfin, les personnes qui ont été titulaires d’un mandat électif public sont aussi prises en compte, jusqu’à la fin de la sixième année à compter de l’expiration dudit mandat. Les six années correspondent à la durée du mandat d’un maire, d’un conseiller départemental ou d’un conseiller régional, mais il vaut pour toutes les personnes titulaires d’un mandat électif public. La commission mixte paritaire n’a pas souhaité prévoir un délai plus long, en raison des difficultés qu’il y aurait à rapporter la preuve du lien entre l’agression et l’ancienne qualité d’élu dans ce cas (CMP, Rapp. n° 2239 AN et n° 361 S, 27 févr. 2024, p. 8 s.).
La loi du 21 mars 2024 instaure aussi une nouvelle circonstance aggravante à l’infraction de destruction de bien de nature à créer un danger pour les personnes (C. pén., art. 322-6 s.). Depuis l’entrée en vigueur de la loi du 28 février 2017 relative à la sécurité publique, cette infraction est aggravée par la qualité de personne dépositaire de l’autorité publique de la victime. Certains élus entrent dans cette catégorie, car ils sont titulaires de fonctions exécutives : c’est par exemple le cas des maires, des présidents de conseils régionaux et départementaux. En revanche, un député ne rentre pas dans cette catégorie. Pour cette raison, le législateur a décidé d’également mentionner les personnes chargées d’une mission de service public au 3° de l’article 322-8 du code pénal. A priori, l’adjonction de cette qualité permet de couvrir l’ensemble des élus victimes. On doit tout de même émettre une réserve au regard de l’article 223-1-1 du code pénal (mise en danger de la vie d’autrui par diffusion d’informations), qui mentionne simultanément « une personne dépositaire de l’autorité publique, chargée d’une mission de service public ou titulaire d’un mandat électif public ». Sur ce texte, la loi du 21 mars 2024 a ajouté deux nouvelles catégories de victimes : les candidats à un mandat électif public pendant la durée de la campagne électorale et le conjoint, un ascendant ou un descendant en ligne directe ou une autre personne vivant habituellement au domicile de la personne dont la qualité est mentionnée au deuxième alinéa de l’article 223-1-1, dès lors que l’infraction a été commise en raison de ses fonctions. Ces qualités ont été ajoutées, mutatis mutandis, en tant que circonstance aggravante de l’atteinte à la vie privée (C. pén., art. 226-1). Toujours dans le registre de l’édification de nouvelles circonstances aggravantes, la loi du 21 mai 2024 a érigé la qualité de titulaire d’un mandat électif de la victime en circonstance aggravante du harcèlement moral (C. pén., art. 222-33-2-2). Contrairement à ce qu’il a fait pour les violences volontaires, le législateur n’a pas souhaité mentionner les anciens titulaires d’un mandat électif public pour ces infractions.
L’amélioration de la répression passe aussi par la diversification des peines qui peuvent être prononcées. Pour l’outrage à l’encontre d’une personne chargée d’une mission de service public (C. pén., art. 433-5), la diffamation publique à l’encontre de certains fonctionnaires et agents publics (Loi 29 juill. 1881, art. 31) et les injures publiques adressées aux mêmes personnes (Loi 29 juill. 1881, art. 33), la loi a ajouté une peine de travail d’intérêt général. Le procédé est assez original : en principe, le travail d’intérêt général est une peine alternative à l’emprisonnement (C. pén., art. 131-8). Or, les trois infractions en cause n’étaient alors réprimées que d’une peine d’amende. Ce cas de figure n’est toutefois pas inédit : on le retrouve pour la répression des auteurs de graffitis (C. pén., art. 322-1). Pour la commission des lois du Sénat, la possibilité de prononcer une peine de travail d’intérêt général, avec ou sans peine d’amende, vise à « améliorer concrètement et pragmatiquement la répression » pour ces infractions (Sénat, Rapp. n° 7, 5 oct. 2023, p. 22). Il est vrai que les vertus de cette peine sont connues et reconnues.
Toutefois, la configuration qui a été retenue est peu propice à l’application du travail d’intérêt général. En effet, cette peine doit nécessairement être acceptée par la personne condamnée (C. pén., art. 131-8). En règle générale, la peine est acceptée pour éviter l’emprisonnement. Pour des infractions réprimées par une seule peine d’amende, la menace est moins pesante. Surtout, si le condamné accepte la peine de travail d’intérêt général mais ne l’exécute pas, il commet une infraction qui lui fait encourir une peine d’emprisonnement (C. pén., art. 434-42). Il n’est donc pas certain que le travail d’intérêt général soit une peine régulièrement acceptée dans ce cadre.
Enfin, au cours des débats parlementaires, une modification du régime de prescription des délits de diffamation et d’injures visés aux articles 31 et 33 de la loi du 29 juillet 1881 avait été envisagée, dans un premier temps pour allonger le délai à un an (Sénat, Rapp. n° 7, 5 oct. 2023, p. 25 s.). Face à la bronca des sociétés de journalistes et à l’impossibilité pour les députés et les sénateurs de parvenir à un accord, ce point de réforme a été abandonné.
Améliorer la protection fonctionnelle
Le titre II de la loi du 21 mars 2024, qui tend à améliorer la prise en charge des élus victimes de violences, d’agressions ou d’injures dans le cadre de leur mandat ou d’une campagne électorale, réforme essentiellement le mécanisme de protection fonctionnelle des élus. De manière synthétique, la protection fonctionnelle est due par l’administration à ses agents. Elle se caractérise par une triple obligation : couvrir l’agent des condamnations civiles, accorder une protection juridique en cas de poursuites et protéger l’agent contre les agressions et voies de fait qu’il pourrait subir dans l’exercice de ses fonctions (F.-X. Fort, Droit et obligations dans la fonction publique, Dalloz, 2022/2023, nos 511.00 s.). On retrouve les textes généraux relatifs à la protection fonctionnelle aux articles L. 134-1 et suivants du code général de la fonction publique.
Pour les élus locaux ayant des fonctions exécutives, il faut se référer à des textes spéciaux figurant dans le code général des collectivités territoriales : l’article L. 4135-29 pour les présidents de conseils régionaux, l’article L. 3123-29 pour les présidents de conseils départementaux, l’article L. 2123-35 pour les maires. Par le jeu de renvois, ces règles valent également pour les élus ayant des fonctions exécutives dans des établissements publics de coopération intercommunale. À cet égard, le législateur a corrigé un oubli pour que la protection professionnelle puisse aussi bénéficier aux élus des communautés de commune (CGCT, art. L. 5214-8).
Pour que l’élu bénéficie de cette protection, il était nécessaire que l’organe délibérant de la collectivité décide de l’octroyer et fixe les modalités de protection et de réparation (CE 9 juill. 2014, n° 380377, AJDA 2014. 2398
). La loi du 21 mars 2024 a modifié les textes précités pour automatiser l’octroi de la protection fonctionnelle des élus victimes de violences, de menaces ou d’outrages à l’occasion ou du fait de leurs fonctions. Elle détaille la procédure à suivre : l’élu doit adresser sa demande à la collectivité territoriale, en la présentant à son président ou au maire, et s’il a lui-même cette qualité, à son suppléant ou un élu ayant reçu délégation. La collectivité doit ensuite la transmettre au préfet et informer les membres de l’organe délibérant. Par la suite, l’organe délibérant a la possibilité de retirer ou d’abroger la décision de protection accordée à l’élu par délibération motivée. L’octroi de la protection est donc devenu le principe, auquel il reste possible de déroger. La loi du 21 mars 2024 a également bridé le pouvoir d’appréciation des communes sur les sommes prises en charge au titre de la protection fonctionnelle, en leur imposant de prendre en charge tout ou partie du reste à charge ou des dépassements d’honoraires résultant des dépenses liées aux soins médicaux et à l’assistance psychologique engagées par les bénéficiaires de la protection (CGCT, art. L. 2123-35). Pour le reste, les communes ont l’obligation de souscrire un contrat d’assurance afférent à la protection fonctionnelle (CGCT, art. L. 2123-34) et visant à couvrir les frais de conseil juridique, d’assistance psychologique et les coûts qui résultent de l’obligation de protection.
D’autres évolutions de la protection fonctionnelle sont prévues à plus long terme. À compter du 21 mars 2025, les candidats aux élections locales et nationales pourront bénéficier de la protection fonctionnelle par l’État pour une période allant des six mois précédant le premier jour du mois de l’élection et jusqu’au tour de l’élection auquel ils participent (C. élect., art. L. 52-18-1). En outre, l’État prendra à sa charge certaines dépenses de sécurité lorsqu’une menace envers un candidat est avérée (C. élect., art. L. 52-18-2). Toujours dans le sens d’un élargissement de la protection fonctionnelle, l’article 18 de la loi du 21 mars 2024 impose au gouvernement de remettre au Parlement un rapport sur l’opportunité d’élargir le bénéfice de la protection fonctionnelle aux élus locaux, y compris à ceux qui n’exercent pas de fonctions exécutives, ainsi qu’aux conjoints, aux enfants et aux ascendants directs des conseillers départementaux et régionaux. Le rapport doit être remis dans un délai de trois mois.
Enfin, pour renforcer la protection qu’un élu ou qu’un candidat pourrait obtenir en souscrivant personnellement un contrat d’assurance, il est prévu d’instaurer un mécanisme juridique permettant de contraindre une entreprise d’assurance à couvrir les risques de dommages des biens meubles et immeubles tenant lieu de permanence électorale ou accueillant des réunions électorales (C. assur., art. L. 253-1). Cette disposition entrera en vigueur le 21 mars 2025.
Renforcer la communication entre les élus et les acteurs judiciaires
Les élus locaux sont des partenaires privilégiés du ministère public, à qui ils doivent communiquer des informations et signaler des faits. Toutefois, selon l’exposé des motifs, ces échanges connaissent une certaine forme d’unilatéralité, et les élus se retrouvent parfois en difficulté pour expliquer des décisions judiciaires à leurs administrés. À cette fin, la loi prévoit une série de dispositions qui tendent à renforcer la communication entre les élus et les acteurs judiciaires.
Un maire peut notamment être interrogé par des administrés sur les suites qui ont été données à une infraction ayant marqué les habitants de la commune. Le maire a lui-même le droit de recevoir cette information par l’autorité judiciaire (CSI, art. L. 123-3). Jusqu’à présent, il devait en faire la demande. Désormais, le procureur de la République doit systématiquement informer le maire des classements sans suite, des mesures alternatives aux poursuites, des poursuites engagées, des jugements devenus définitifs ou des appels interjetés relatifs à des infractions causant un trouble à l’ordre public commises sur le territoire de sa commune. Pour ce qui est des infractions dénoncées sur le fondement de l’article 40, la loi impose désormais un délai d’un mois au procureur de la République pour informer le maire. Les maires peuvent également être informés des suites données à des infractions commises contre leurs homologues. À cet égard, l’article 14 de la loi du 21 mars 2024 autorise la mise en place de conventions prévoyant un protocole d’information des maires sur le traitement judiciaire des infractions commises à l’encontre des élus. Elles doivent être signées entre les associations représentatives des élus locaux, le représentant de l’État dans le département et le procureur de la République.
L’information sur les affaires pénales en lien avec une commune peut également avoir lieu directement entre ses habitants et le procureur de la République. Un nouvel alinéa ajouté à l’article L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales prévoit que le procureur peut diffuser dans un espace réservé du bulletin municipal toute communication en lien avec les affaires de la commune. On peut se demander s’il est nécessaire de graver dans le marbre de la loi ce type de disposition. Rien n’interdisait de le faire, et on imagine mal des élus s’y opposer. Par ailleurs, les procureurs apprécieront la lettre de l’article L. 2121-27-1 et le rappel un brin vexatoire qu’ils doivent respecter le secret de l’enquête et de l’instruction lorsqu’ils communiquent ces informations.
La loi du 21 mars 2024 tend également à renforcer les liens entre maires et procureurs en détaillant la composition des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance. Institués par le décret n° 2002-999 du 17 juillet 2002, ces conseils ont une mission de coordination et de pilotage de la politique locale de prévention de la délinquance dans les communes de plus de 5 000 habitants (CSI, art. L. 132-4). Depuis de nombreuses années, l’article D. 132-8 du code de la sécurité intérieure liste les personnes qui en font partie : le maire, le préfet, le procureur, des représentants des services de l’État, des représentants d’associations… Les douze alinéas ajoutés à l’article L. 132-4 du même code ne remettent pas réellement en cause cette composition, mais ils instaurent une distinction entre les membres de droit, dont fait partie le procureur ou son représentant, et les membres désignés. Or, le texte ajoute qu’il doit se tenir au moins une réunion par an du conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance en présence des membres de droit.
Les liens qui unissent les maires au procureur de la République ont, par l’effet de cette loi, vocation à se renforcer. Cette relation est susceptible d’entraîner des difficultés lorsque l’élu est soupçonné d’avoir commis une infraction pénale. Le législateur a donc décidé de faciliter le dépaysement de l’enquête dans cette situation : à la demande du maire, sur proposition du procureur de la République ou d’office, le procureur général peut transmettre la procédure au procureur de la République auprès du tribunal judiciaire le plus proche du ressort de la cour d’appel (C. pr. pén., art. 43). Ce dépaysement était d’ores et déjà possible pour toute personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, et pouvait donc s’appliquer à des élus. Il était toutefois nécessaire d’établir des relations habituelles de par ses fonctions ou de par sa mission avec les magistrats ou fonctionnaires de la juridiction. Le nouvel alinéa consacré aux maires ne reprend pas cette condition. Même si elle contribue à faire des élus des justiciables à part, il faut souligner que cette disposition est à la fois gage d’impartialité et de délicatesse.
En dépit des apports de cette loi, on peut douter qu’elle suffise à répondre pleinement aux attentes des élus. Les dispositions sur la protection fonctionnelle ne sont mobilisées qu’après coup, tandis que l’augmentation du quantum des différentes peines encourues n’a qu’un effet dissuasif limité. Les auteurs de la loi du 21 mars 2024 en sont bien conscients, puisque le dernier article du texte impose au gouvernement de remettre un rapport dans un délai de trois mois, recensant les actions menées pour lutter contre les violences faites aux élus et leurs résultats.
© Lefebvre Dalloz