Maintien à disposition de la justice de l’étranger placé en rétention : abrogation constitutionnelle du délai de 24 heures et résurrection transitoire du délai de 6 heures
Dans la décision n° 2025-1158 QPC du 12 septembre 2025, le Conseil constitutionnel juge contraire à l’article 66 de la Constitution la durée de vingt-quatre heures du maintien à disposition de la justice de l’étranger placé en rétention, et dont le juge judiciaire a prononcé la remise en liberté. Dans l’attente d’une intervention législative, le report des effets de l’inconstitutionnalité s’accompagne d’une réactivation du délai de six heures prévu par une version antérieure de la disposition abrogée.
 
                            Malgré une saisine a priori du Conseil constitutionnel (Cons. const. 25 janv. 2024, n° 2023-863 DC, Dalloz actualité, 29 janv. 2024, obs. M.-C. de Montecler ; AJDA 2024. 180  ; ibid. 650, étude J. Bonnet et P.-Y. Gahdoun
 ; ibid. 650, étude J. Bonnet et P.-Y. Gahdoun  ; D. 2024. 170, et les obs.
 ; D. 2024. 170, et les obs.  ; ibid. 219, point de vue P. Esplugas-Labatut
 ; ibid. 219, point de vue P. Esplugas-Labatut  ; ibid. 2025. 209, obs. M.-L. Basilien-Gainche, O. Boskovic, F. Jault-Seseke, N. Joubert et K. Parrot
 ; ibid. 2025. 209, obs. M.-L. Basilien-Gainche, O. Boskovic, F. Jault-Seseke, N. Joubert et K. Parrot  ; ibid. 1268, obs. E. Debaets et N. Jacquinot
 ; ibid. 1268, obs. E. Debaets et N. Jacquinot  ; AJCT 2024. 70, obs. G. Pailler
 ; AJCT 2024. 70, obs. G. Pailler  ; Gaz. Pal. 26 mars 2024, n° 11, p. 29, obs. S. Slama), de nombreuses dispositions coercitives de la vaste réforme du droit des étrangers opérée par la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 n’avaient pas fait l’objet d’un contrôle de constitutionnalité. Tel était le cas, notamment, de son article 75, en ce qu’il portait de dix à vingt-quatre heures le délai mentionné par l’article L. 743-19 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, relatif au maintien « à la disposition de la justice » de l’étranger placé en centre de rétention administrative dont le juge judiciaire a prononcé la remise en liberté. Il s’agit, ainsi, de laisser le temps au ministère public qui n’aurait pas indiqué le contraire, de former un appel de ladite décision et d’en demander le caractère suspensif en cas d’insuffisance des garanties de représentation de la personne ou de menace grave pour l’ordre public (CESEDA, art. L. 743-22). Contesté par voie de question prioritaire de constitutionnalité (QPC), un tel délai est jugé contraire aux exigences de l’article 66 de la Constitution pour porter une atteinte excessive à la liberté individuelle (Cons. const. 12 sept. 2025, n° 2025-1158 QPC, § 71, AJDA 2025. 1626
 ; Gaz. Pal. 26 mars 2024, n° 11, p. 29, obs. S. Slama), de nombreuses dispositions coercitives de la vaste réforme du droit des étrangers opérée par la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 n’avaient pas fait l’objet d’un contrôle de constitutionnalité. Tel était le cas, notamment, de son article 75, en ce qu’il portait de dix à vingt-quatre heures le délai mentionné par l’article L. 743-19 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, relatif au maintien « à la disposition de la justice » de l’étranger placé en centre de rétention administrative dont le juge judiciaire a prononcé la remise en liberté. Il s’agit, ainsi, de laisser le temps au ministère public qui n’aurait pas indiqué le contraire, de former un appel de ladite décision et d’en demander le caractère suspensif en cas d’insuffisance des garanties de représentation de la personne ou de menace grave pour l’ordre public (CESEDA, art. L. 743-22). Contesté par voie de question prioritaire de constitutionnalité (QPC), un tel délai est jugé contraire aux exigences de l’article 66 de la Constitution pour porter une atteinte excessive à la liberté individuelle (Cons. const. 12 sept. 2025, n° 2025-1158 QPC, § 71, AJDA 2025. 1626  ; D. 2025. 1568
 ; D. 2025. 1568  ). Cohérente et prévisible au regard de la jurisprudence antérieure du Conseil, cette décision n’en est pas moins remarquable à plusieurs égards. En plus de constituer une nouvelle illustration d’un glissement dans l’approche des questions soulevées par le droit des étrangers, elle apporte une nouvelle illustration de l’évolution des prérogatives que se reconnaît le Conseil constitutionnel dans l’aménagement des effets de ces décisions d’abrogation.
). Cohérente et prévisible au regard de la jurisprudence antérieure du Conseil, cette décision n’en est pas moins remarquable à plusieurs égards. En plus de constituer une nouvelle illustration d’un glissement dans l’approche des questions soulevées par le droit des étrangers, elle apporte une nouvelle illustration de l’évolution des prérogatives que se reconnaît le Conseil constitutionnel dans l’aménagement des effets de ces décisions d’abrogation.
« Obstacle » à une « décision juridictionnelle » émanant d’un « magistrat du siège (…) dans la plénitude des pouvoirs que lui confère son rôle de gardien de la liberté individuelle », la possibilité de prolonger la privation de liberté de l’étranger a néanmoins été admise, en forme d’exception, depuis la loi n° 2003-1119 du 26 novembre 2003 et la décision n° 2003-484 DC (Cons. const. 20 nov. 2003, n° 2003-484 DC, AJDA 2004. 599  , note O. Lecucq
, note O. Lecucq  ; D. 2004. 1405
 ; D. 2004. 1405  , note O. Lecucq
, note O. Lecucq  ; ibid. 1278, obs. L. Domingo
 ; ibid. 1278, obs. L. Domingo  ; RTD civ. 2004. 65, obs. J. Hauser
 ; RTD civ. 2004. 65, obs. J. Hauser  ; art. L. 552-10 de l’anc. CESEDA). Au départ d’une durée maximale de quatre heures, ce maintien en rétention a été porté à six heures par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011, puis à dix heures par la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 et, enfin, à vingt-quatre heures par la loi dont est issue la disposition contestée. Alors que l’introduction de cette mesure avait été approuvée par le Conseil constitutionnel au terme d’une motivation soulignant la nécessité de principe de respecter les décisions juridictionnelles rendues par le juge judiciaire, son allongement à six heures avait été admis sans discussion véritable au regard de l’« effet limité » de la modification législative contestée (Cons. const. 9 juin 2011, n° 2011-631 DC, § 33, Dalloz actualité, 15 juin 2011, obs. M.-C. de Montecler ; AJDA 2011. 1174
 ; art. L. 552-10 de l’anc. CESEDA). Au départ d’une durée maximale de quatre heures, ce maintien en rétention a été porté à six heures par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011, puis à dix heures par la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 et, enfin, à vingt-quatre heures par la loi dont est issue la disposition contestée. Alors que l’introduction de cette mesure avait été approuvée par le Conseil constitutionnel au terme d’une motivation soulignant la nécessité de principe de respecter les décisions juridictionnelles rendues par le juge judiciaire, son allongement à six heures avait été admis sans discussion véritable au regard de l’« effet limité » de la modification législative contestée (Cons. const. 9 juin 2011, n° 2011-631 DC, § 33, Dalloz actualité, 15 juin 2011, obs. M.-C. de Montecler ; AJDA 2011. 1174  ; ibid. 1936, étude O. Lecucq
 ; ibid. 1936, étude O. Lecucq  ; JA 2011, n° 442, p. 7, obs. S.Z.-D.
 ; JA 2011, n° 442, p. 7, obs. S.Z.-D.  ; ibid., n° 442, p. 9, obs. L.T.
 ; ibid., n° 442, p. 9, obs. L.T.  ; Constitutions 2011. 581, chron. V. Tchen
 ; Constitutions 2011. 581, chron. V. Tchen  ; ibid. 2012. 63, obs. A. Levade
 ; ibid. 2012. 63, obs. A. Levade  ). Par ailleurs, alors que l’extension par la loi du 10 septembre 2018 concernait aussi bien l’étranger placé en rétention (art. 29) que celui placé en zone d’attente (art. 21), seule la disposition relative à cette dernière hypothèse avait été soumise à l’examen du Conseil dans le cadre de son contrôle a priori. Il avait admis la conformité à la Constitution de ce délai de dix heures, tout en précisant qu’il « ne saurait être étendu au-delà » sans méconnaître l’article 66 de la Constitution (Cons. const. 6 sept. 2018, n° 2018-770 DC, § 59, Dalloz actualité, 10 sept. 2018, obs. P. Januel ; AJDA 2018. 1703
). Par ailleurs, alors que l’extension par la loi du 10 septembre 2018 concernait aussi bien l’étranger placé en rétention (art. 29) que celui placé en zone d’attente (art. 21), seule la disposition relative à cette dernière hypothèse avait été soumise à l’examen du Conseil dans le cadre de son contrôle a priori. Il avait admis la conformité à la Constitution de ce délai de dix heures, tout en précisant qu’il « ne saurait être étendu au-delà » sans méconnaître l’article 66 de la Constitution (Cons. const. 6 sept. 2018, n° 2018-770 DC, § 59, Dalloz actualité, 10 sept. 2018, obs. P. Januel ; AJDA 2018. 1703  ; ibid. 2401
 ; ibid. 2401  , note P. Mouzet
, note P. Mouzet  ; D. 2019. 1248, obs. E. Debaets et N. Jacquinot
 ; D. 2019. 1248, obs. E. Debaets et N. Jacquinot  ; AJ fam. 2018. 494, obs. V. Avena-Robardet
 ; AJ fam. 2018. 494, obs. V. Avena-Robardet  ; Constitutions 2018. 379, chron. J.-P. Derosier
 ; Constitutions 2018. 379, chron. J.-P. Derosier  ; ibid. 421, chron. L. Imbert
 ; ibid. 421, chron. L. Imbert  ; ibid. 426, chron. C. Pouly
 ; ibid. 426, chron. C. Pouly  ). Le délai de vingt-quatre heures résultant de la loi du 26 janvier 2024 excédant très largement celle limite de dix heures, la solution ici dégagée peut paraître on ne peut plus prévisible, et il peut même sembler étonnant que ce point n’ait pas été soulevé lors des saisines a priori du Conseil. Certes, la question n’est pas rigoureusement identique, mais les délais applicables aux étrangers placés en rétention et en zone d’attente avaient toujours été alignés jusqu’à la loi du 26 janvier 2024, et le Conseil n’a pas distingué les deux hypothèses lorsqu’il a été amené à les apprécier simultanément (v. Cons. const. 9 juin 2011, n° 2011-631 DC, préc. §§ 31 s.). S’il fallait opérer une distinction, il serait même permis de penser qu’elle ne serait pas en faveur de l’étranger placé en zone d’attente, et dont il a pu être contesté qu’il se trouvât privé de liberté (T. confl. 12 févr. 2018, n° C4110, Lebon
). Le délai de vingt-quatre heures résultant de la loi du 26 janvier 2024 excédant très largement celle limite de dix heures, la solution ici dégagée peut paraître on ne peut plus prévisible, et il peut même sembler étonnant que ce point n’ait pas été soulevé lors des saisines a priori du Conseil. Certes, la question n’est pas rigoureusement identique, mais les délais applicables aux étrangers placés en rétention et en zone d’attente avaient toujours été alignés jusqu’à la loi du 26 janvier 2024, et le Conseil n’a pas distingué les deux hypothèses lorsqu’il a été amené à les apprécier simultanément (v. Cons. const. 9 juin 2011, n° 2011-631 DC, préc. §§ 31 s.). S’il fallait opérer une distinction, il serait même permis de penser qu’elle ne serait pas en faveur de l’étranger placé en zone d’attente, et dont il a pu être contesté qu’il se trouvât privé de liberté (T. confl. 12 févr. 2018, n° C4110, Lebon  ; AJDA 2018. 307
 ; AJDA 2018. 307  ; comp. T. confl. 9 févr. 2015, n° 3986). Quoi qu’il en soit, il est certain que la disposition litigieuse n’avait pas été jugée conforme à la Constitution, et peu discutable que la Cour de cassation ait jugé la QPC suffisamment sérieuse pour être transmise au Conseil (Civ. 1re, QPC, 12 juin 2025, n° 25-40.008).
 ; comp. T. confl. 9 févr. 2015, n° 3986). Quoi qu’il en soit, il est certain que la disposition litigieuse n’avait pas été jugée conforme à la Constitution, et peu discutable que la Cour de cassation ait jugé la QPC suffisamment sérieuse pour être transmise au Conseil (Civ. 1re, QPC, 12 juin 2025, n° 25-40.008). 
Comme l’y invitait cet arrêt de transmission, et comme dans les premières décisions sur la question, le Conseil limite son analyse à la conformité à l’article 66 de la Constitution. Cela n’est pas véritablement critiquable dès lors que le caractère excessif de l’atteinte à la liberté individuelle suffit à prononcer l’abrogation, et que l’examen des autres griefs aurait ainsi pu sembler surabondant. On peut toutefois le regretter dans la perspective plus générale du droit des étrangers, et de l’articulation avec la protection d’autres droits et libertés fondamentaux. Outre une atteinte à la liberté individuelle, le requérant invoquait en effet d’autres arguments, fondés sur les droits de la défense et l’équité de la procédure au sens de l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme (§ 3). Surtout, était mis en lumière le traitement défavorable de l’étranger retenu, comparativement à celui de l’accusé placé en détention provisoire, dont le code de procédure pénale ne permettait le maintien en détention que pendant quatre heures dans le cadre du « référé détention » (§ 4), c’est à dire en cas d’appel du ministère public d’une décision de remise en liberté d’une personne placée en détention provisoire (C. pr. pén., art. 148-1-1 et 187-3 mod. par la loi n° 2025-532 qui a porté ce délai à 8h ; RSC 2003. 644, obs. M.-C. Lazerges  ). Sans invoquer la présomption d’innocence, moyen voué à l’échec au vu de la jurisprudence constitutionnelle limitant son domaine aux procédures exposant à une « sanction ayant le caractère d’une punition » (v. not., Cons. const. 25 janv. 2024, n° 2023-863 DC, § 125, préc.), le requérant arguait d’une atteinte au principe d’égalité devant la loi et la justice. Sans doute tout autant voué à l’échec, dès lors que ce principe n’interdit pas de traiter différemment des personnes qui se trouvent, ici, indéniablement dans des situations différentes, l’argument n’en était pas moins intéressant. Il n’est en effet peut-être pas dénué de pertinence de confronter la rigueur du traitement des étrangers à celle de personnes qui, parce qu’elles peuvent se prévaloir d’être accusées d’infractions d’une certaine gravité (C. pr. pén., art. 143-1), bénéficient d’un encadrement plus strict des conditions permettant de les maintenir privés de liberté. Quoique bien connu et fermement maintenu par une jurisprudence constante, le paradoxe pourrait paraître d’autant plus grand que les critères d’application de la dérogation au principe de l’exécution des décisions de remise en liberté se rejoignent, notamment par le critère du trouble à l’ordre public (v. C. pr. pén., art. 144).
). Sans invoquer la présomption d’innocence, moyen voué à l’échec au vu de la jurisprudence constitutionnelle limitant son domaine aux procédures exposant à une « sanction ayant le caractère d’une punition » (v. not., Cons. const. 25 janv. 2024, n° 2023-863 DC, § 125, préc.), le requérant arguait d’une atteinte au principe d’égalité devant la loi et la justice. Sans doute tout autant voué à l’échec, dès lors que ce principe n’interdit pas de traiter différemment des personnes qui se trouvent, ici, indéniablement dans des situations différentes, l’argument n’en était pas moins intéressant. Il n’est en effet peut-être pas dénué de pertinence de confronter la rigueur du traitement des étrangers à celle de personnes qui, parce qu’elles peuvent se prévaloir d’être accusées d’infractions d’une certaine gravité (C. pr. pén., art. 143-1), bénéficient d’un encadrement plus strict des conditions permettant de les maintenir privés de liberté. Quoique bien connu et fermement maintenu par une jurisprudence constante, le paradoxe pourrait paraître d’autant plus grand que les critères d’application de la dérogation au principe de l’exécution des décisions de remise en liberté se rejoignent, notamment par le critère du trouble à l’ordre public (v. C. pr. pén., art. 144). 
Il est, à cet égard, tout à fait frappant d’observer la différence de perspective dans les motivations successives des différentes décisions du Conseil. Sans doute en partie lié au prisme qu’implique la QPC, dont l’objet est la « protection des droits et libertés que la Constitution garantit » (Constitution, art. 61-1), le glissement n’en est pas moins remarquable. En 2003, en effet, lors de l’introduction de cette possibilité de maintien à disposition de l’étranger, la question était clairement posée en termes de respect des prérogatives des magistrats du siège et de leurs décisions juridictionnelles. Pour admettre un tel « obstacle » à la remise en liberté, la Conseil avait pris soin d’insister sur la qualité de magistrat du titulaire du droit d’appel que cette disposition tend à préserver, et sur sa qualité distincte de celle des parties à l’instance (Cons. const. 20 nov. 2003, n° 2003-484 DC, préc., § 75). Une telle dérogation à l’effectivité des décisions juridictionnelles de l’autorité judiciaire ne semblait alors admise qu’en raison de l’appartenance du ministère public à cette même autorité. Non-partie à l’instance, qui oppose l’étranger et le représentant de l’État, le ministère public est un magistrat dont la décision, quoiqu’implicite et non juridictionnelle, de ne pas renoncer au maintien à disposition de l’étranger, se présente comme servant les intérêts de la justice. Il est alors assez frappant que de telles considérations aient presque totalement disparu dans la décision du 12 septembre 2025. S’il est bien rappelé qu’il ne peut, « en principe » être fait obstacle à une décision juridictionnelle de remise en liberté (§ 7), la dérogation instituée n’est plus analysée au regard du statut de celui dont il s’agit de préserver les prérogatives, mais uniquement au regard de l’objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre public et de lutte contre l’immigration irrégulière qui y participe (§ 10 ; v. déjà, Cons. const. 22 avr. 1997, n° 97-389 DC, § 36, AJDA 1997. 524  , note F. Julien-Laferrière
, note F. Julien-Laferrière  ; D. 1999. 237
 ; D. 1999. 237  , obs. F. Mélin-Soucramanien
, obs. F. Mélin-Soucramanien  ).
). 
Loin des considérations relatives à la séparation des pouvoirs, c’est une mise en balance de ces objectifs avec la liberté individuelle de l’étranger qui conduit au constat de contrariété à la Constitution. Selon le Conseil, le maintien à disposition de la justice pendant une durée pouvant atteindre vingt-quatre heures, sans qu’un magistrat du siège ne soit amené à se prononcer sur le bien-fondé d’une telle mesure pendant ce délai, porte une « atteinte excessive » à la liberté individuelle (§ 11). Dans cette approche, le ministère public apparaît comme le serviteur de ces objectifs à valeur constitutionnelle, objectifs rattachés à la police administrative. Un tel effacement de l’argument fondé sur le statut du ministère public peut sans doute être diversement interprété. Cela peut être vu comme un marqueur de la fragilisation de la position constitutionnelle par les droits européens (comp. not., Cons. const. 8 déc. 2017, n° 2017-680 QPC, § 9, D. 2018. 953, obs. T. S. Renoux ; AJDA 2018. 509  , note J. Roux
, note J. Roux  ; ibid. 2017. 2440
 ; ibid. 2017. 2440  ; D. 2017. 2485, et les obs.
 ; D. 2017. 2485, et les obs.  ; ibid. 2018. 953, chron. T. S. Renoux
 ; ibid. 2018. 953, chron. T. S. Renoux  ; ibid. 1344, obs. E. Debaets et N. Jacquinot
 ; ibid. 1344, obs. E. Debaets et N. Jacquinot  ; AJ pénal 2018. 83, note A. Taleb-Karlsson
 ; AJ pénal 2018. 83, note A. Taleb-Karlsson  ; Constitutions 2017. 657, Décision
 ; Constitutions 2017. 657, Décision  ; RSC 2018. 163, chron. B. de Lamy
 ; RSC 2018. 163, chron. B. de Lamy  ; CEDH 23 nov. 2010, Moulin c/ France, n° 37104/06, §§ 56-59, Dalloz actualité, 24 nov. 2010, obs. S. Lavric ; AJDA 2011. 889, chron. L. Burgorgue-Larsen
 ; CEDH 23 nov. 2010, Moulin c/ France, n° 37104/06, §§ 56-59, Dalloz actualité, 24 nov. 2010, obs. S. Lavric ; AJDA 2011. 889, chron. L. Burgorgue-Larsen  ; D. 2011. 338, obs. S. Lavric
 ; D. 2011. 338, obs. S. Lavric  , note J. Pradel
, note J. Pradel  ; ibid. 2010. 2761, édito. F. Rome
 ; ibid. 2010. 2761, édito. F. Rome  ; ibid. 2011. 26, point de vue F. Fourment
 ; ibid. 2011. 26, point de vue F. Fourment  ; ibid. 277, note J.-F. Renucci
 ; ibid. 277, note J.-F. Renucci  ; RFDA 2011. 987, chron. H. Labayle et F. Sudre
 ; RFDA 2011. 987, chron. H. Labayle et F. Sudre  ; RSC 2011. 208, obs. D. Roets
 ; RSC 2011. 208, obs. D. Roets  ; CJUE, gr. ch., 2 mars 2021, aff. C-746/18, §§ 54-56, Dalloz actualité, 5 mars 2021, obs. C. Crichton ; AJDA 2021. 1086, chron. P. Bonneville, C. Gänser et A. Iljic
 ; CJUE, gr. ch., 2 mars 2021, aff. C-746/18, §§ 54-56, Dalloz actualité, 5 mars 2021, obs. C. Crichton ; AJDA 2021. 1086, chron. P. Bonneville, C. Gänser et A. Iljic  ; D. 2021. 470
 ; D. 2021. 470  ; ibid. 1564, obs. J.-B. Perrier
 ; ibid. 1564, obs. J.-B. Perrier  ; ibid. 2022. 2002, obs. W. Maxwell et C. Zolynski
 ; ibid. 2022. 2002, obs. W. Maxwell et C. Zolynski  ; AJ pénal 2021. 267, obs. S. Lavric
 ; AJ pénal 2021. 267, obs. S. Lavric  ; Dalloz IP/IT 2021. 123, obs. C. Crichton
 ; Dalloz IP/IT 2021. 123, obs. C. Crichton  ; ibid. 468, obs. B. Bertrand
 ; ibid. 468, obs. B. Bertrand  ; RTD eur. 2022. 481, obs. B. Bertrand
 ; RTD eur. 2022. 481, obs. B. Bertrand  ), ou simplement comme le fruit du mécanisme de la QPC, recours individuel plus propice aux balances d’intérêts. Quoi qu’il en soit, le délai de vingt-quatre heures institué est déclaré contraire à la Constitution (§ 12). Comme souvent, le Conseil reporte toutefois les effets de l’abrogation prononcée (§ 14) et exclut que la contrariété constatée à la Constitution puisse être invoquées pour contester des mesures prises antérieurement à la publication de cette décision (§ 15). Une abrogation immédiate aurait en effet des conséquences « manifestement excessives » pour « remettre en cause l’effet utile du recours suspensif pouvant être exercé par le ministère public » (§ 14). Teintée d’une terminologie plus familière en droit de l’Union européenne, la formule peut étonner s’agissant de la préservation d’une prérogative dont le fondement n’est que législatif. Faut-il comprendre qu’il existerait une exigence constitutionnelle de préserver – et donc a fortiori de prévoir – un recours suspensif du ministère public face au risque que représente la remise en liberté de l’étranger ? Une telle lecture pourrait paraître d’autant plus excessive que le risque de trouble à l’ordre public ou l’absence de garanties de représentation ne sont pas encore établis. Ils ne sont, à ce stade, pas même encore formellement allégués mais, tout au plus, implicitement envisagés par l’omission de renoncer au délai de maintien à disposition (CESEDA, art. L. 743-19) avant d’être, le cas échéant, invoqués pour justifier d’une demande de caractère suspensif de l’appel (CESEDA, art. L. 743-22).
), ou simplement comme le fruit du mécanisme de la QPC, recours individuel plus propice aux balances d’intérêts. Quoi qu’il en soit, le délai de vingt-quatre heures institué est déclaré contraire à la Constitution (§ 12). Comme souvent, le Conseil reporte toutefois les effets de l’abrogation prononcée (§ 14) et exclut que la contrariété constatée à la Constitution puisse être invoquées pour contester des mesures prises antérieurement à la publication de cette décision (§ 15). Une abrogation immédiate aurait en effet des conséquences « manifestement excessives » pour « remettre en cause l’effet utile du recours suspensif pouvant être exercé par le ministère public » (§ 14). Teintée d’une terminologie plus familière en droit de l’Union européenne, la formule peut étonner s’agissant de la préservation d’une prérogative dont le fondement n’est que législatif. Faut-il comprendre qu’il existerait une exigence constitutionnelle de préserver – et donc a fortiori de prévoir – un recours suspensif du ministère public face au risque que représente la remise en liberté de l’étranger ? Une telle lecture pourrait paraître d’autant plus excessive que le risque de trouble à l’ordre public ou l’absence de garanties de représentation ne sont pas encore établis. Ils ne sont, à ce stade, pas même encore formellement allégués mais, tout au plus, implicitement envisagés par l’omission de renoncer au délai de maintien à disposition (CESEDA, art. L. 743-19) avant d’être, le cas échéant, invoqués pour justifier d’une demande de caractère suspensif de l’appel (CESEDA, art. L. 743-22). 
Il demeure que le législateur devra faire cesser l’inconstitutionnalité constatée avant le 1er octobre 2026. Cela pourrait passer par une réduction du délai de maintien à disposition de la justice ou bien, comme le suggère peut-être le Conseil (§ 11, a contrario), par la prévision d’une décision anticipée d’un magistrat du siège sur cette privation de liberté. La première hypothèse est sans doute la plus probable et laisse assez peu de marge au législateur. Si la décision n° 2018-770 relative au maintien en zone d’attente semble indiquer qu’un délai de dix heures serait acceptable, il faut souligner que le Conseil fait ici un choix différent à titre transitoire. De façon inédite à notre connaissance, il accompagne en effet le report des effets de l’inconstitutionnalité constatée d’une « réactivation » d’une version antérieure de la disposition abrogée, en admettant un maintien à disposition de l’étranger pour une durée de six heures maximum (§ 16). Pour équilibrée et donc satisfaisante que puisse paraître cette solution temporaire, elle n’en pose pas moins question quant à l’office du Conseil. Après les « réserves d’interprétation transitoires » (Cons. const. 6 juill. 2018, n° 2018-717/718 QPC, § 24, Dalloz actualité, 10 juill. 2018, obs. E. Maupin ; AJDA 2018. 1421  ; ibid. 1781
 ; ibid. 1781  ; ibid. 1786
 ; ibid. 1786  ; ibid. 1781, note J. Roux
 ; ibid. 1781, note J. Roux  , note V. Tchen
, note V. Tchen  ; D. 2018. 1894, et les obs.
 ; D. 2018. 1894, et les obs.  , note C. Saas
, note C. Saas  ; ibid. 2019. 347, obs. O. Boskovic, S. Corneloup, F. Jault-Seseke, N. Joubert et K. Parrot
 ; ibid. 2019. 347, obs. O. Boskovic, S. Corneloup, F. Jault-Seseke, N. Joubert et K. Parrot  ; ibid. 1248, obs. E. Debaets et N. Jacquinot
 ; ibid. 1248, obs. E. Debaets et N. Jacquinot  ; AJ fam. 2018. 426 et les obs.
 ; AJ fam. 2018. 426 et les obs.  ; RFDA 2018. 959, note J.-E. Schoettl
 ; RFDA 2018. 959, note J.-E. Schoettl  ; ibid. 966, note M. Verpeaux
 ; ibid. 966, note M. Verpeaux  ; Constitutions 2018. 341, Décision
 ; Constitutions 2018. 341, Décision  ; ibid. 389, chron. B. Mathieu
 ; ibid. 389, chron. B. Mathieu  ; ibid. 399, chron. A. Ponseille
 ; ibid. 399, chron. A. Ponseille  ; RSC 2018. 1001, obs. B. de Lamy
 ; RSC 2018. 1001, obs. B. de Lamy  ; RFDA 2018. 775, obs. M. Charité), le droit des étrangers aura ainsi vu naître les « résurrections législatives », résurrection d’autant plus remarquable qu’elle ne revient pas à l’état immédiatement antérieur du texte (délai de 10 h issu de la loi du 10 sept. 2018), mais à son avant-dernière version, issue de la loi du 16 juin 2011. Le Conseil s’en explique en soulignant que celle-ci avait été jugée conforme à la Constitution dans sa décision du 9 juin 2011 (Cons. const. 9 juin 2011, n° 2011-631 DC, préc.) et l’on se souvient que l’extension à dix heures n’avait pas été soumise au Conseil s’agissant des étrangers placés en rétention (v. supra). En fixant le délai à six heures seulement, peut-être le Conseil suggère-t-il un refus, nouveau, d’assimilation entre rétention et zone d’attente, auquel cas existerait une incertitude sur le caractère proportionné d’un maintien à disposition de dix heures dans la première situation. Il paraît toutefois plus probable que, par la précaution prise d’invoquer le dernier état du texte explicitement approuvé par sa propre jurisprudence, le Conseil souhaite surtout éviter d’apparaître trop frontalement comme législateur, fût-ce à titre transitoire.
 ; RFDA 2018. 775, obs. M. Charité), le droit des étrangers aura ainsi vu naître les « résurrections législatives », résurrection d’autant plus remarquable qu’elle ne revient pas à l’état immédiatement antérieur du texte (délai de 10 h issu de la loi du 10 sept. 2018), mais à son avant-dernière version, issue de la loi du 16 juin 2011. Le Conseil s’en explique en soulignant que celle-ci avait été jugée conforme à la Constitution dans sa décision du 9 juin 2011 (Cons. const. 9 juin 2011, n° 2011-631 DC, préc.) et l’on se souvient que l’extension à dix heures n’avait pas été soumise au Conseil s’agissant des étrangers placés en rétention (v. supra). En fixant le délai à six heures seulement, peut-être le Conseil suggère-t-il un refus, nouveau, d’assimilation entre rétention et zone d’attente, auquel cas existerait une incertitude sur le caractère proportionné d’un maintien à disposition de dix heures dans la première situation. Il paraît toutefois plus probable que, par la précaution prise d’invoquer le dernier état du texte explicitement approuvé par sa propre jurisprudence, le Conseil souhaite surtout éviter d’apparaître trop frontalement comme législateur, fût-ce à titre transitoire.
Cons. const. 12 sept. 2025, n° 2025-1158 QPC
par Marion Lacaze, Maître de conférences à l’Université de Bordeaux, ISCJ (UR 4633)
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