Modalités d’appel et de répartition des cotisations issues du fonds de travaux

Les cotisations issues du fonds de travaux sont appelées au même rythme que le budget prévisionnel et ne sont pas réparties à proportion des provisions de ce budget incombant à chaque copropriétaire, mais comme les charges relatives à la conservation, à l’entretien et à l’administration des parties communes.

Institué par la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (dite « loi ALUR »), qui a modifié la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, et mis en place depuis le 1er janvier 2017, le fonds de travaux (Loi du 10 juill. 1965, art. 14-2, II) a pour objectif de permettre la constitution d’une épargne afin de préfinancer de futurs travaux, notamment de rénovation énergétique.

Il remplace ainsi les « provisions spéciales » de l’ancien article 18, alinéa 6, de la loi de 1965, lequel imposait au syndic de soumettre, lors de sa première désignation et au moins tous les trois ans, au vote de l’assemblée générale, la décision d’appeler des sommes en vue de faire face aux travaux d’entretien ou de conservation des parties communes et des éléments d’équipement commun, susceptibles d’être nécessaires dans les trois années à échoir et non encore décidés.

L’article 14-2, II, sera modifié par la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (dite « loi ELAN »), laquelle précisera que l’affectation des cotisations « doit tenir compte de l’existence de parties communes spéciales ou de clefs de répartition des charges ». Cependant, les faits sont ici antérieurs à cette modification et l’article 14-2, II, dans sa rédaction de l’époque, dispose que le fonds de travaux est alimenté par une cotisation annuelle obligatoire dont le taux ne peut être inférieur à 5 % du montant du budget prévisionnel et qui est versée par les copropriétaires « selon les mêmes modalités que celles décidées par l’assemblée générale pour le versement des provisions du budget prévisionnel », sans référence à l’existence de parties communes spéciales.

Dans cette affaire, une résidence soumise au statut de la copropriété et comportant plusieurs bâtiments, met en place le fonds de travaux et décide de l’alimenter via une cotisation annuelle de 5 % du montant du budget prévisionnel répartie en fonction des tantièmes généraux des charges. Un copropriétaire décide de contester cette répartition, laquelle l’oblige, selon lui, à participer aux charges entraînées par les services collectifs et les éléments d’équipement commun n’ayant aucune utilité pour lui d’une part, et à supporter des dépenses afférentes aux autres bâtiments que celui au sein duquel il détient un lot, d’autre part.

Échéance, montant et répartition de la cotisation du fonds de travaux

Saisie du litige, la Cour d’appel de Grenoble déboute le copropriétaire de ses prétentions (Grenoble, 7 juin 2022, n° 20/01066), lequel se pourvoit en cassation. Et la Haute juridiction de donner raison aux juges du fond.

En tout premier lieu, l’article 14-2, II, concerne les modalités d’appel des cotisations du fonds de travaux, que ce soit au regard de leur périodicité (chaque trimestre ou toute autre durée décidée par l’assemblée générale) ou de leur montant, lequel est calculé en fonction du budget prévisionnel.

Ensuite et surtout, l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965 précise que les copropriétaires sont tenus de verser au fonds de travaux la cotisation « proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives comprises dans leurs lots, telles que ces valeurs résultent des dispositions de l’article 5 ».

De fait, il ressort de ces dispositions que si la cotisation du fonds de travaux est appelée au même rythme que le budget prévisionnel, « elle n’est pas répartie à proportion des provisions de ce budget incombant à chaque copropriétaire, mais comme les charges relatives à la conservation, à l’entretien et à l’administration des parties communes générales ». Le pourvoi du copropriétaire a donc été rejeté.

Dissociation de l’appel des cotisations et de leur affectation

La mise en place du fonds de travaux a été rapidement confrontée à un problème, à savoir les modalités d’utilisation par le syndic des fonds ainsi perçus. Car si les cotisations sont calculées en fonction des tantièmes généraux, comment utiliser les fonds lorsque des travaux concernant un élément d’équipement ou des parties communes spéciales sont votés ? Le risque n’est-il pas de voir certains copropriétaires participer à des dépenses ne les concernant pas ? Et c’est précisément cette difficulté qui est à l’origine de la présente affaire, à ceci près que le requérant a confondu l’appel des cotisations avec les modalités de leur utilisation dans le financement de travaux.

C’est pour éviter de telles difficultés que le législateur est intervenu en 2018 pour que les cotisations soient affectées, le cas échéant, en tenant compte des parties communes spéciales ou des clés de répartition des charges. Une précision bienvenue mais qui n’aurait pas modifié l’issue du présent litige puisque cette réforme ne modifie ni le rythme des appels de cotisation, ni ses modalités de calcul.

 

Civ. 3e, 4 juill. 2024, FS-B, n° 22-21.758

© Lefebvre Dalloz