Panorama de l’actualité « Affaires » de la semaine du 17 mars 2025
Sélection de l’actualité « Affaires » marquante de la semaine du 17 mars.
 
                            Avocats
Accès dérogatoire à la profession d’avocat: juristes d’entreprise
- L’activité consistant, pour le juriste affecté exclusivement à un service juridique de l’entreprise, à apporter ses compétences en droit social au service en charge de la gestion du personnel, relève du traitement des problèmes juridiques posés par l’activité de celle-ci
 Pour rejeter la demande d’inscription au tableau de l’ordre des avocats sous le bénéfice des dispenses de formation et de diplôme prévues à l’article 98, 3°, du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, après avoir relevé que la candidate avait travaillé, du 6 mai 2013 à novembre 2015, en qualité de juriste d’entreprise au sein du service juridique d’une entreprise rattaché à la direction de l’entreprise et dont elle était la seule membre, un arrêt ne peut retenir que, nonobstant son autonomie et la diversité de ses compétences juridiques, la candidate s’occupait dans des proportions importantes de la gestion sociale de l’entreprise, notamment en traitant des contentieux individuels et collectifs du travail, en rédigeant des accords collectifs de travail et documents internes à la société ayant trait à la vie sociale, et en contribuant à l’organisation des élections professionnelles, de sorte qu’elle n’exerçait pas à titre exclusif des fonctions répondant aux problèmes juridiques posés par l’activité de celle-ci. En statuant ainsi, la cour d’appel qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les articles 93 et 98, 3°, du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991. (Civ. 1re, 19 mars 2025, n° 23-20.904, FS-B)
- L’activité consistant, pour le juriste, à assurer la mise en œuvre des exigences de conformité, notamment en ce qui concerne la lutte contre le blanchiment et la corruption, et du règlement général de protection des données, peut relever du traitement des problèmes juridiques posés par l’activité de l’entreprise et constituer un service juridique spécialisé au sens de l’article 93 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d’avocat. (Civ. 1re, 19 mars 2025, n° 23-19.915, FS-B)
Concurrence
La Commission fournit des orientations au titre de la législation sur les marchés numériques afin de faciliter le développement de produits innovants sur les plateformes d’Apple
- La Commission européenne a adopté deux décisions en vertu du Digital Markets Act (DMA) précisant les mesures qu’Apple doit prendre pour se conformer à certains aspects de son obligation d’interopérabilité. Les mesures finales énoncées dans ces deux décisions font suite à un engagement approfondi avec Apple et aux contributions de tiers dans le cadre de la consultation publique lancée le 18 décembre 2024. Le premier ensemble de mesures concerne neuf fonctionnalités de connectivité iOS, principalement utilisées pour les appareils connectés tels que les montres connectées, les casques audio ou les téléviseurs. Ces mesures permettront aux fabricants d’appareils et aux développeurs d’applications d’accéder plus facilement aux fonctionnalités de l’iPhone qui interagissent avec ces appareils (par exemple, l’affichage des notifications sur les montres connectées), d’accélérer les transferts de données (par exemple, les connexions Wi-Fi peer-to-peer et la communication en champ proche) et de simplifier la configuration des appareils (par exemple, l’appairage). Le deuxième ensemble de mesures améliore la transparence et l’efficacité du processus mis en place par Apple pour les développeurs souhaitant obtenir l’interopérabilité avec les fonctionnalités de l’iPhone et de l’iPad. Cela comprend un meilleur accès à la documentation technique sur les fonctionnalités non encore disponibles pour les tiers, une communication et des mises à jour plus rapides, ainsi qu’un calendrier d’examen des demandes d’interopérabilité plus prévisible. (Comm. eur., communiqué de presse, 19 mars 2025)
La Commission adresse des constatations préliminaires à Alphabet en vertu du règlement sur les services numérique
- La Commission européenne a émis deux conclusions préliminaires à l’encontre d’Alphabet pour non-respect du Digital Markets Act (DMA), concernant deux services pour lesquels elle a été désignée comme contrôleur d’accès. Premièrement, la Commission a informé Alphabet de son avis préliminaire selon lequel certaines fonctionnalités de Google Search traitent ses propres services plus favorablement que ceux de ses concurrents, ne garantissant ainsi pas le traitement transparent, équitable et non discriminatoire des services tiers requis par le DMA. De plus, la Commission a informé Alphabet de son avis préliminaire selon lequel sa place de marché d’applications Google Play n’est pas conforme au DMA, car les développeurs d’applications ne peuvent pas librement orienter les consommateurs vers d’autres canaux pour obtenir de meilleures offres. Ceci ne préjuge pas de l’issue de l’enquête. Si les avis préliminaires de la Commission sont finalement confirmés, elle adoptera une décision de non-conformité. (Comm. eur., communiqué de presse, 19 mars 2025)
Rupture des relations commerciales établies : préavis effectif
- Il résulte de l’article L. 442-6, I, 5°, du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019, que le préavis accordé à la suite de la rupture d’une relation commerciale établie doit être effectif, de sorte que, sauf circonstances particulières, la relation commerciale doit se poursuivre aux conditions antérieures pendant l’exécution du préavis, ce qui implique que les modifications qui peuvent lui être apportées ne doivent pas être substantielles. (Com., 19 mars 2025, n° 23-23.507, F-B)
Relation commerciale établie : insuffisance du préavis
- La cour d’appel, qui a fait ressortir que les conditions de la relation au cours de cette période ne permettaient pas à la société victime de la rupture de se réorganiser et ne lui garantissaient donc pas un préavis effectif, a pu retenir que la phase post-contractuelle d’écoulement des stocks n’avait pas à être imputée sur la durée du préavis dû et que les fruits tirés de l’écoulement des stocks ne devaient pas être pris en considération aux fins du calcul des dommages et intérêts réparant l’insuffisance du préavis. (Com., 19 mars 2025, n° 23-22.182, F-B)
Franchise : obligation de non-concurrence
- Le franchisé peut, sans violer la clause de non-concurrence stipulée au contrat de franchise ni les obligations de loyauté et de bonne foi contractuelles, accomplir des actes préparatoires à une activité concurrente de celle du franchiseur, à condition que cette activité ne débute effectivement qu’après l’expiration du contrat de franchise et de son engagement de non-concurrence. (Com. 19 mars 2025, nos 23-22.925 et 24-13.066, F-B)
Private enforcement
- Saisie d’une demande de dommages et intérêts fondée sur l’article 1240 du code civil, la cour d’appel, qui n’a pas fait application de l’article L. 481-2 du code de commerce, lequel assure la transposition de l’article 9, paragraphe 1, de la directive 2014/104/UE du 26 novembre 2014, mais a interprété l’article 1240 du code civil, qu’elle a appliqué à la lumière de cette disposition de la directive, ne s’est pas contredite. (Com. 19 mars 2025, n° 23-20.418, F-D)
Contrôle des concentrations dans la distribution alimentaire de grande consommation
- L’Autorité a achevé son analyse des opérations de reprises de magasins anciennement sous enseigne Casino par les groupes Intermarché, Carrefour et Auchan. Le 27 février 2024, Auchan a notifié à l’Autorité son projet d’acquisition de 98 magasins de distribution à dominante alimentaire sous enseigne du groupe Casino. Afin de tenir compte de la situation économique difficile des magasins, l’Autorité a accordé à Auchan, à sa demande, une dérogation à l’effet suspensif du contrôle des concentrations. Conformément au régime applicable, cette dérogation, qui a permis à Auchan de réaliser l’opération sans attendre la décision de l’Autorité, ne préjugeait en rien de la décision finale prise par l’Autorité, qui à l’issue de son instruction et de son analyse concurrentielle pouvait remettre en cause certaines des acquisitions en considérant que des remèdes seraient nécessaires dans les zones où la concurrence serait insuffisante pour les consommateurs après l’opération. Après examen de l’opération de rachat, l’Autorité a finalement autorisé Auchan à prendre le contrôle de l’ensemble de ces points de vente sous réserve d’engagements sur deux magasins afin que les consommateurs puissent bénéficier d’alternatives suffisantes pour faire jouer la concurrence pour leurs achats de produits de grande consommation. (Aut. conc., déc. n° 25-DCC-65 du 21 mars 2025, relative à la prise de contrôle exclusif de 98 magasins anciennement sous enseigne Casino par Auchan)
Contrats
Vices cachés : délais d’action
- Il résulte des articles 1648 et 2232, alinéa 1er, du code civil que l’action en garantie des vices cachés doit être formée dans le délai de deux ans à compter de la découverte du vice ou, en matière d’action récursoire, à compter de l’assignation, sans pouvoir dépasser le délai-butoir de vingt ans à compter du jour de la naissance du droit, lequel est, en matière de garantie des vices cachés, le jour de la vente conclue par la partie recherchée en garantie. (Com. 19 mars 2025, n° 22-24.761, F-B)
Capitalisation des intérêts échus
- Il résulte de l’article 1343-2 du code civil que les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt si le contrat l’a prévu ou si une décision de justice le précise. La capitalisation des intérêts est de droit lorsqu’elle est judiciairement demandée. (Civ. 3e, 20 mars 2025, n° 23-16.765, FS-B)
Procédure commerciale
Passerelle du juge des référés au juge du fond
- En cas de saisine de la juridiction de fond en application de l’article 873-1 du code de procédure civile, aucun texte spécial ne vient déroger aux dispositions générales des articles 4 et 70 du même code, de sorte que le lorsque le juge est saisi pour statuer au fond sur renvoi du juge des référés en application de l’article 873-1 précité, les parties peuvent présenter devant lui des demandes incidentes, additionnelles ou reconventionnelles qui n’avaient pas été présentées devant le juge des référés. La cour d’appel est saisie, le cas échéant, de ces demandes, en application des règles générales relatives à l’effet dévolutif de l’appel. (Com. 19 mars 2025, n° 22-24.761, FR-B)
Sociétés
Preuve de la notification diligente de la réalisation forcée des parts sociales de société civile
- Il résulte de la combinaison des articles 1861 et 1867 du code civil, de l’article 9 du code de procédure civile, de l’alinéa 1er de l’article 49 du décret n° 78-704 du 3 juillet 1978, et de l’article R. 233-9 du code des procédures civiles d’exécution qu’il incombe au créancier poursuivant la vente forcée de parts sociales de société civile nanties à son profit, pour pouvoir se prévaloir de l’agrément du cessionnaire, de rapporter la preuve que la réalisation forcée des parts sociales, soit la date de l’adjudication, a été notifiée un mois avant la vente tant à la société qu’aux associés.
 Du reste, il résulte de l’article 1240 du code civil qu’en tant qu’officier ministériel, l’huissier de justice, devenu commissaire de justice, chargé d’actes d’exécution est garant de la légalité des poursuites et engage sa responsabilité pour les fautes qu’il commet dans l’exercice de cette mission, notamment, lorsqu’il procède à des recouvrements irréguliers auprès du débiteur visé par les actes d’exécution. (Civ. 1re, 19 mars 2025, n° 22-20.861, FR-B)
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