Panorama rapide de l’actualité « Affaires » du 9 juin 2025

Sélection de l’actualité « Affaires » marquante de la semaine du 9 juin.

Banque

« Fraude au Président »

  • Une société dont le comptable, après avoir été trompée par de faux courriers électroniques au nom du dirigeant de celle-ci, avait adressé à sa banque quatre ordres de virement au profit d’une société étrangère sur un compte ouvert dans une banque hongroise, n’est pas fondée à reprocher à sa banque d’avoir manqué à son devoir de vigilance dès lors que le montant de ces virements restait dans la limite des plafonds quotidiens convenus et demeurait couvert par le solde créditeur du compte, et que la destination des virements était un compte détenu dans les livres d’une banque agréée dans un pays membre de l’Union européenne qui n’attirait pas spécialement l’attention en termes de sécurité, de sorte que ces opérations ne présentaient pas d’anomalies devant alerter la banque. (Com. 12 juin 2025, n° 24-10.168, FS-B)
  • Pour retenir la responsabilité d’une banque, un arrêt ne peut relever que les ordres de virement litigieux étaient affectés d’anomalies apparentes qui ne pouvaient qu’attirer son attention et en déduit qu’en s’abstenant de vérifier auprès du dirigeant de la société ou du directeur financier que ces ordres avaient bien été donnés avec l’accord de la société, elle avait manqué à son devoir de vigilance. En se déterminant ainsi, sans rechercher comme elle y était invitée, si la banque n’avait pas satisfait à son devoir de vigilance en obtenant une confirmation de la part d’une personne habilitée à émettre des ordres de paiement, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision. (Com. 12 juin 2025, n° 24-13.697, F-B)

Opération de paiement non autorisée et escroquerie téléphonique

  • Après avoir exactement énoncé que, dans l’hypothèse d’ordres de paiement non autorisés, il appartient à la banque de fournir les éléments afin de prouver la faute ou la négligence grave commise par sa cliente, l’arrêt, se fondant sur les auditions par les services d’enquête du dirigeant et de l’employée de la société, retient que la secrétaire de cette société avait reçu un appel téléphonique d’un soi-disant employé de la banque l’avertissant d’une panne informatique qui avait fait disparaitre les écritures du matin, et qu’à la demande de l’escroc, cette employée, après s’être connectée au service de paiement en ligne à l’aide du dispositif de sécurité personnalisé mais sans le mot de passe, avait effectué diverses manipulations afin de reconstituer les écritures sans se méfier de son interlocuteur qui ne lui demandait pas de mot de passe. Il relève que la circonstance que l’escroc ait pu usurper un numéro de téléphone de la banque et annoncer le code qui s’affichait sur l’écran de l’utilisatrice était de nature à persuader celle-ci qu’elle était en relation avec un technicien. Il ajoute que la connaissance par son interlocuteur des opérations réalisées avant l’appel et de leur disparition pouvait la conforter dans la croyance qu’un incident informatique était survenu. Il retient encore que l’historique des opérations versé aux débats par la société révèle que le numéro d’abonné du titulaire de la carte de transfert sécurisé n’était pas attaché à la validation des tiers. De ces constatations et appréciations, la cour d’appel a pu déduire que la société n’avait pas commis de négligence grave dans la conservation et l’utilisation de ses données personnelles de sécurité. (Com. 12 juin 2025, n° 24-13.777, F-B)

Pouvoir d’un parent pour opérer un virement au débit du compte de son enfant mineur

  • Le virement au débit du compte ouvert au nom d’un mineur étant un acte de disposition, il doit être accompli par les deux parents exerçant l’administration légale conjointement ou être, à défaut, autorisé par le juge des tutelles. Une banque, en ne sollicitant pas l’autorisation de l’un des parents pour accomplir cet acte de disposition, commet une faute engageant sa responsabilité.(Com 12 juin 2025, n° 24-13.604, FS-B)

Concurrence

Pratiques de non-débauchage dans les secteurs de l’ingénierie, du conseil en technologie et des services informatique

Prise de contrôle exclusif de la société XPage Group (groupe BVA) par la société IPSOS : décision d’autorisation sans conditions

  • Le 12 juin 2025, l’Autorité de la concurrence a autorisé sans condition le rachat de la société Xpage Group, maison-mère du groupe BVA par la société IPSOS, spécialiste des sondages, enquêtes et études de marchés. L’instruction n’a relevé aucun risque pour la concurrence, les parts de marché combinées des entreprises concernées étant inférieures à 25 %, un seuil en dessous duquel les marchés sont généralement considérés comme non affectés, sur un marché caractérisé par la présence de nombreux concurrents incluant à la fois des acteurs de dimension mondiale et de nouveaux entrants récents. (Aut. conc., Décis. 25-DCC-123 DU 12 juin 2025, ISOS/Xpage)

Consommation

Relevé d’office des clauses abusives et autorité de la chose jugée

  • Méconnaît l’article 7, §1er de la directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 et l’article L. 132-1, devenu L. 212-1, du code de la consommation, la cour d’appel qui constate que les contestations relatives au caractère abusif de plusieurs clauses d’un contrat de prêt se heurtent à la chose jugée attachée à un précédent jugement, alors qu’elle était tenue de procéder à l’examen du caractère abusif des clauses litigieuses, auquel ne s’était livrée aucune autre juridiction, sans que l’autorité de la chose jugée d’un jugement ni son caractère irrévocable ne puissent faire obstacle à cet examen. (Civ. 2e, 12 juin 2025, n° 22-22.946, FD)

Surendettement des particuliers et vérification des créances

  • Lorsque le juge des contentieux de la protection est déjà saisi par la commission aux fins de vérification d’une créance, le débiteur n’est pas recevable à contester lors de cette instance une autre créance, figurant à l’état du passif dressé par la commission, qu’il n’a pas contestée dans le délai de 20 jours suivant la date à laquelle cet état lui a été notifié. (Civ. 2e, 12 juin 2025, n° 23-15.025, F-B)

Entreprises en difficulté

Prononcé d’une faillite personnelle : indifférence de l’existence d’une insuffisance d’actif

  • Le tribunal peut prononcer la faillite personnelle du dirigeant de la personne morale débitrice contre lequel a été relevé un ou plusieurs faits énumérés par les articles L. 653-4 et L. 653-5 du code de commerce, sans qu’il soit tenu de constater l’existence d’une insuffisance d’actif. (Com., 12 juin 2025, nº 24-13.566, F-B)

Formalisme de la contestation de créance

  • Selon l’article R. 624-1 alinéa 2 du code de commerce, si une créance autre que celle mentionnée à l’article L. 625-1 du code de commerce est contestée, le mandataire judiciaire avise le créancier ou son mandataire de cette contestation par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Le délai de trente jours prévu à l’article L. 622-27 du même code court à compter de la réception de la lettre. Cette lettre précise l’objet de la discussion, indique le montant de la créance dont l’inscription est proposée et rappelle les dispositions de l’article L. 622-27 du code de commerce. Il en résulte que lorsque le mandataire judiciaire fait signifier la lettre de contestation par voie d’huissier de justice, l’acte de signification n’a pas à reproduire les dispositions de l’article L. 622-27 du code de commerce dès lors que la lettre de contestation les rappelle. (Com., 12 juin 2025, nº 23-23.365, F-B)

Liquidation judiciaire ouverte concomitamment à la résolution d’un plan de redressement : portée quant à la résiliation d’un bail commercial

  • Il résulte des articles L. 622-27, L. 641-11-1, I et II et L. 641-12, 3° du code de commerce, et 500 du code de procédure civile qu’une liquidation judiciaire ouverte concomitamment à la résolution d’un plan de redressement constitue une nouvelle procédure collective, laquelle fait obstacle à la résiliation du bail des immeubles pour des loyers échus postérieurement au jugement d’ouverture du redressement judiciaire. Le bailleur dispose cependant de la faculté de se prévaloir d’une décision constatant ou prononçant la résolution du bail dès lors que cette décision a acquis force de chose jugée avant le jugement d’ouverture de cette nouvelle procédure. (Com., 12 juin 2025, nº 23-22.076, F-B)

Sociétés et marchés financiers

Procédures de complétion et de correction des données inscrites au Registre national des entreprises

  • Un décret du 13 juin procède à la fusion entre la procédure de complétion et la procédure de correction des données inscrites au Registre national des entreprises (RNE) et prévues respectivement aux articles R. 123-242-1 et R. 123-293-1 du code de commerce. En effet, la procédure de correction permet à la fois la correction et la complétion des données d’une entreprise au RNE tout en présentant des garanties plus élevées en termes de sécurité et de contrôle d’accès au traitement de données. La procédure de correction est à cet effet modifiée afin d’intégrer certaines caractéristiques de la procédure de complétion (ajout de la référence aux registres ou répertoire ayant permis la constitution native du RNE, précisions sur les modalités de signature électronique).(Décr. n° 2025-536 du 13 juin 2025 relatif aux procédures de complétion et de correction des données inscrites au Registre national des entreprises (RNE))

Autorité des marchés financiers : droit au silence

  • Il résulte de la combinaison des dispositions du 7° bis du II de l’article L. 621-9 et du a) et du b) du II de l’article L. 621-15 du Code monétaire et financier que la commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers est compétente pour prononcer une sanction à l’encontre des sociétés de gestion établies dans un autre État membre de l’Union européenne à raison de manquements à leurs obligations professionnelles commis dans la gestion, en France, d’OPCVM (Organismes de Placement Collectif en Valeurs Mobilières) agréés conformément à la directive 2009/65/CE, ainsi qu’à l’encontre des personnes physiques placées sous leur autorité ou qui agissent pour leur compte.
    La commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers était ainsi compétente pour prononcer des sanctions à raisons de manquements commis, au cours de cette période, tant par la société que par les personnes physiques agissant pour son compte, dans la gestion de ces OPCVM.
    Il résulte de l’article 9 de la Déclaration de 1789 le principe selon lequel nul n’est tenu de s’accuser, dont découle le droit de se taire. Ces exigences s’appliquent non seulement aux peines prononcées par les juridictions répressives mais aussi à toute sanction ayant le caractère d’une punition. Au nombre de ces sanctions figurent notamment celles susceptibles d’être prononcées par la commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers.
    En revanche, le droit de se taire ne s’applique pas lors des contrôles ou enquêtes, tels que, s’agissant de l’Autorité des marchés financiers, ceux prévus par l’article L. 621-9 du Code monétaire et financier, diligentés antérieurement à la notification des griefs. Ne saurait ainsi constituer une méconnaissance des exigences découlant de l’article 9 de la Déclaration de 1789 le fait que, dans le cadre d’un tel contrôle ou d’une telle enquête, les contrôleurs ou les enquêteurs de l’Autorité des marchés financiers auraient recueilli des éléments portant sur des faits susceptibles d’être ultérieurement reprochés aux personnes concernées dans le cadre d’une procédure de sanction ouverte à leur encontre par cette autorité.
    Il appartient au juge administratif, saisi d’une requête dirigée contre une sanction pécuniaire prononcée par la commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers, de vérifier que son montant était, à la date à laquelle elle a été infligée, proportionné tant aux manquements commis qu’à la situation, notamment financière, de la personne sanctionnée. Dans l’hypothèse où il est amené à réformer cette sanction, il lui appartient également, eu égard à son office de juge de plein contentieux, de tenir compte de la situation de la personne sanctionnée à la date où il statue pour apprécier si le montant de l’amende, qu’il substitue à celle prononcée par la commission des sanctions, n’est pas excessif au regard de cette situation. (CE, 13 juin 2025, n° 471548, B, Société H2O AM LLP et autres)

 

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