Panorama rapide de l’actualité « Propriété intellectuelle » des semaines 1er juin au 30 juin 2025

Sélection de l’actualité « Propriété intellectuelle » marquante des semaines 1er juin au 30 juin 2025

Propriété littéraire et artistique

Intelligence artificielle

  • Utilisation de livres numérisés dans le cadre de l’entraînement des modèles d’IA et fair use. Anthropic a téléchargé gratuitement des millions de livres protégés par le droit d’auteur sous forme numérique à partir de sites pirates sur Internet. L’entreprise a également acheté des livres protégés par le droit d’auteur (dont certains faisaient double emploi avec ceux acquis sur les sites pirates), en a scanné chaque page et les a stockés dans des fichiers numérisés et consultables, dans le but de constituer une bibliothèque centrale regroupant tous les livres du monde afin de les conserver. À partir de cette bibliothèque centrale, l’entreprise d’IA a sélectionné divers ensembles et sous-ensembles de livres numérisés afin de former divers grands modèles linguistiques en cours de développement pour alimenter ses services d’IA. Certains de ces livres ont été écrits par des auteurs plaignants, qui intentent une action pour violation du droit d’auteur. Dans le cadre de ce jugement sommaire, la question était de savoir dans quelle mesure l’utilisation des œuvres en question peut-elle relever du fair use. D’après la juridiction, l’utilisation à des fins de formation, de même que la conversion du format papier au format numérique sont des utilisations équitables. Cependant, elle considère que les copies piratées de la bibliothèque ne relèvent pas d’un cas de Fair use. Le fait que Anthropic ait ensuite acheté un exemplaire d’un livre auparavant volé sur Internet ne l’exonère pas de sa responsabilité pour le vol, mais cela peut avoir une incidence sur le montant des dommages-intérêts légaux. (United States District Court, Northern district of California, Andrea Bartz, Charles Graeber and Kirk Wallace Johnson v. Anthropic PBC, n° C 24-05417, 23 juin 2025)

CSPLA

  • Contenus synthétiques. Le CSPLA lance une mission relative à la protection des contenus générés avec le recours à l’IA générative. Elle est confiée à Alexandra Bensamoun. Les conclusions sont attendues en juin 2026.
  • Hypertrucages. Le CSPLA confie à Célia Zolynski et Joëlle Farchy une mission relative aux enjeux pour les secteurs culturels et créatifs des hypertrucages générés ou manipulés par l’intelligence artificielle. Leurs conclusions seront publiées en juin 2026.
  • Attribution. Le CSPLA lance une mission relative à l’attribution des œuvres et des prestations artistiques. LElle sera pilotée par Valérie-Laure Benabou et Séverine Dusollier. Les conclusions sont attendues en juin 2026.
  • Rapport NFT. Le CSPLA publie le rapport de mission relatif à la Charte de bonnes pratiques contractuelles en matière de NFT. Cette mission avait été confiée Jean Martin, avocat à la Cour, et Stéphanie Kass-Dano, conseillère référendaire à la Cour de cassation, en juin 2024.

Base de données

  • Reconnaissance de la qualification juridique de base de données (non). Pour rappel, le droit sui generis a pour objectif de protéger les investissements dans des systèmes de collecte et de stockage de données rendus indispensables par l’augmentation exponentielle des données générées par la société de l’information (Dir. 96/9/CE, cons. 9, 10, 12). Il est accordé ’lorsque l’obtention, la vérification ou la présentation du contenu de la base de données attestent un investissement substantiel du point de vue qualitatif ou quantitatif’. Il est attribué au ’producteur’ ou ’fabricant’ qui est la personne qui prend l’initiative et le risque des investissements (article 7 de la directive). La notion de risque s’entend à la fois du risque financier qui se traduit par des bénéfices ou des pertes, mais aussi de la responsabilité qui en découle en cas de dommages subis du fait de l’utilisation de la base. En l’espèce, par des motifs pertinents qui répondent aux moyens soulevés en appel et que la cour adopte, le tribunal a considéré que l’application mise au point par Monsieur [B] constitue un programme informatique fonctionnant à partir du tableur Excel et permettant au personnel concerné d’entrer les informations concernant sa situation administrative et son temps de travail, qui n’équivaut pas à la mise à disposition des textes applicables de manière systématique ou méthodique, selon des modalités les rendant individuellement accessibles, caractéristiques de la constitution d’une base de données, ce qu’illustrent parfaitement les deux films produits par Monsieur [B] (p. 23 et 24), qui confirment que cet outil est conforme aux textes en vigueur, mais ne démontrent pas que ceux-ci sont accessibles. Le tribunal a à juste titre retenu qu’il n’était pas établi que les données individuelles entrées par les agents dans l’application étaient conservées selon une méthode autorisant leur identification et opérant leur disposition systématique ou méthodique, et qu’il existait un regroupement de ces informations dans un espace informatique commun organisant leur disposition de manière systématique ou méthodique. Enfin, la cour ajoute que le nombre très important d’heures consacrées par Monsieur [B] à la conception puis à la mise à jour de cet outil complexe ne peut être considéré comme un investissement humain substantiel au sens des articles L. 341-12 et L. 342-53 du code de la propriété intellectuelle, le temps que lui a consacré l’appelant, qui est intervenu seul, n’étant ni déterminé, ni déterminable, étant précisé qu’aucun autre investissement financier ou matériel n’est allégué. Elle confirmera en conséquence le jugement en ce qu’il a considéré que l’application de Monsieur [B] ne constituait pas une base de données. (CA Lyon, 1re Chambre Civile A, 12 juin 2025, n° 19/08764)

Propriété industrielle

Marques

  • Mauvaise foi. Forme qui concourt à l’obtention d’un résultat technique. La cause de nullité absolue prévue à l’article 52, § 1, sous a), de ce règlement, lu en combinaison avec l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), dudit règlement, et la cause de nullité absolue prévue à l’article 52, § 1, sous b), du même règlement sont autonomes, mais non exclusives l’une de l’autre.
    La mauvaise foi du demandeur de l’enregistrement d’un signe en tant que marque peut, si cet enregistrement a été sollicité à la suite de l’expiration d’un brevet, être étayée en se fondant notamment sur l’opinion de ce demandeur quant à l’aptitude de ce signe à exprimer, intégralement ou partiellement, la solution technique protégée par ce brevet, et cela indépendamment du point de savoir si ledit signe est constitué exclusivement par la forme du produit nécessaire à l’obtention d’un résultat technique, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), de ce règlement. Parmi les circonstances pertinentes pour évaluer l’éventuelle existence d’une mauvaise foi du demandeur figurent également la nature de la marque contestée, l’origine du signe en cause et son utilisation depuis sa création, la portée du brevet expiré, la logique commerciale dans laquelle s’inscrit le dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée et la chronologie des événements ayant caractérisé ce dépôt.
    La mauvaise foi du demandeur ne peut pas être appréciée sur le fondement de circonstances survenues postérieurement au dépôt de la demande d’enregistrement de la marque en cause. (CJUE, 19 juin 2025, C-17/24, CeramTec GmbH c/ Coorstek Bioceramics LLC)
  • Distinctivité. Combinaison de couleurs. La combinaison de couleurs n’est pas distinctive pour des produits en classes 1 et 7 et des services en classes 35 et 37. Les preuves produites par la requérante ne sont pas de nature à démontrer que les consommateurs pourraient identifier des nuances des couleurs bleu et vert utilisées selon différents agencements systématiques afin de distinguer les produits et les services en cause et, en particulier, les différentes stations-service. De même, les preuves produites par la requérante ne permettent pas d’étayer le fait que le public pertinent pourrait identifier chaque exploitant de stations-service uniquement selon le schéma ou le code de couleurs qu’il utilise. En ce sens, l’avis d’expert produit par la requérante ne fait que confirmer que les consommateurs ne peuvent s’appuyer sur des informations relatives aux couleurs pour identifier l’origine commerciale des produits et des services que s’ils ont déjà l’habitude d’associer ces couleurs a une entreprise spécifique. En ce qui concerne les études de marché de novembre 2022 en Autriche et de mars 2023 en Hongrie, en Roumanie et en Slovaquie, il convient de relever que la requérante ne saurait se prévaloir utilement des études, réalisées en 2022 et en 2023, pour apprécier le caractère distinctif intrinsèque de la marque demandée, qui a été enregistrée en tant que marque internationale le 27 janvier 2021. Afin d’apprécier si une marque est ou non dépourvue de caractère distinctif, il convient de prendre en considération l’impression d’ensemble qu’elle produit. Cela ne saurait toutefois impliquer qu’il n’y a pas lieu de procéder, dans un premier temps, à un examen successif des différents éléments de présentation utilisés pour cette marque. S’il ressort des points 37 à 40 de la décision attaquée que la chambre de recours a d’abord examiné les couleurs bleu et vert de manière séparée, il n’en demeure pas moins qu’elle a ensuite effectué une appréciation globale du caractère distinctif de la marque demandée. En particulier, après avoir examiné les associations d’idées que lesdites couleurs pouvaient véhiculer, la chambre de recours a conclu, au point 40 de la décision attaquée, que les deux couleurs considérées individuellement étaient dépourvues de caractère distinctif et que leur combinaison ne conférait pas de caractère distinctif à la marque demandée. Par ailleurs, la chambre de recours a estimé que rien n’indiquait que la combinaison de ces deux couleurs pouvait véhiculer un message aux consommateurs autre que le renforcement de leur connotation liée à l’écologie. (TUE, 11 juin 2025, T-38/24)
  • Forclusion par tolérance. Au regard de l’ensemble des circonstances spécifiques rappelées et, notamment, de l’exploitation continue et publique de la marque n°569 depuis 2012, devenue massive à compter de 2014, sur le même marché des vêtements et dans le même créneau spécifique des produits « sportswear » ou mode-sport, que la société Canada Goose avait connaissance de cet usage par les sociétés Sweet Pants, à tout le moins depuis le milieu de l’année 2016, et dès avant le 1er octobre 2016. Il n’y a pas lieu de considérer, au cas d’espèce, que la catégorie des vêtements visée à l’enregistrement est trop large et qu’il conviendrait de la diviser en sous-catégories autonomes pour retenir que la forclusion ne serait encourue que pour les seuls pantalons de joggings. En effet, aux fins de l’identification d’une sous-catégorie cohérente de produits ou de services susceptible d’être envisagée de manière autonome, le critère de la finalité et de la destination des produits ou des services en cause constitue le critère essentiel, ce qu’il convient d’apprécier de manière concrète (Com., 14 mai 2025, pourvoi n° 23-21.296). Or, rien ne justifie de considérer que les pantalons de jogging constitueraient une sous-catégorie autonome de vêtements, s’agissant de produits d’habillement destinés à être largement portés par une population de tous âges et par le grand public, et non uniquement en vue d’une pratique sportive, ces produits étant en outre commercialisés dans l’ensemble des magasins de prêt à porter. S’agissant des produits de chapellerie, la cour considère que les quelques captures de pages Instagram datées à compter du mois de septembre 2016 versées par les sociétés Sweet Pants sont insuffisantes à démontrer la réalité et l’intensité de l’usage de la marque pour commercialiser des casquettes et, ainsi, la connaissance que la société Canada Goose avait de cet usage pour les produits de la chapellerie à compter de cette date et qu’elle l’ait ainsi toléré pendant une période de cinq ans. (CA Paris, pôle 5 ch. 1, 11 juin 2025, n° 22/19632)
  • Descriptivité (non). Prise dans son ensemble, la marque Powertec Electric n’est pas descriptive pour des produits de la classe 9. Le mot POWER pourra être compris aisément comme « pouvoir », « puissance » ou « force », « énergie » ou même « électricité », et le mot TEC comme l’abréviation linguistique habituelle du mot anglais « technology », l’ensemble étant ainsi compris par le consommateur moyen des produits concernés, même non anglophone, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, comme « power technology », c’est-à-dire « technologie forte / puissante » ou également « technologie de l’énergie / de la force / de la puissance » ou encore « technologie électrique », soit des expressions laudatives et/ou assez vagues, sans signification immédiate et précise au regard des produits en cause, et qui, même rapprochées du mot ELECTRIC, descriptif, inséré dans l’éclair rouge évocateur d’un éclair, ne sont pas « exclusivement », au sens de l’article 7.1 c) précité, descriptives des produits « appareils et instruments pour la conduite, la distribution, la transformation, l’accumulation, le réglage ou la commande du courant électrique » concernés. Ainsi, la marque complexe de la société NORMA, considérée dans son ensemble, est certes évocatrice des produits « appareils et instruments pour la conduite, la distribution, la transformation, l’accumulation, le réglage ou la commande du courant électrique » désignés à son enregistrement, et donc faiblement distinctive, mais n’en est pas pour autant dénuée de toute fantaisie de par l’association d’un néologisme et d’une figure colorée très présente visuellement, et partant n’est pas dépourvue de toute distinctivité, permettant au consommateur moyen desdits produits, d’identifier les produits couverts par la marque comme ceux provenant d’une entreprise déterminée. (CA Paris, pôle 5 ch. 1, 11 juin 2025, n° 23/17122)
  • Distinctivité - Déceptivité - Slogan. Le signe FIER D’ETRE PARISIEN est composé de la revendication ’fier de’ utilisée dans des slogans commerciaux pour mettre en avant la provenance, une qualité ou une caractéristique de produits ou services. Ce signe sera d’emblée compris par le public pertinent comme une manifestation de la fierté d’appartenir à la ville de Paris et comme l’expression d’un attachement affectif à cette ville. Appliqué aux produits qu’il est destiné à désigner, il sera perçu comme valorisant l’origine parisienne ou le caractère parisien de ces produits ce d’autant que Paris est le lieu d’une intense activité touristique et qu’y sont proposés à destination des touristes des produits faisant la promotion de cette ville. Le signe sera donc appréhendé comme une formule promotionnelle proclamant un message d’amour pour la ville de Paris et pour ce qui est parisien et destinée à jouer sur l’attrait exercé par cette ville auprès du consommateur pour inciter ce dernier à acheter les produits porteurs d’un tel signe. Il ne sera pas perçu par le public pertinent comme un indicateur de l’origine commerciale des produits sur lesquels il est apposé car il ne lui permet pas d’emblée de rattacher ces produits à une entreprise déterminée.
    Si le terme ’parisien’ définit en effet ce qui est relatif à Paris et à sa région, le signe FIER D’ETRE PARISIEN proclame et souligne l’importance qualitative attachée à ce lien d’origine auquel sont associées, ainsi que le rappelle la société requérante, des caractéristiques particulières et, notamment, le bon goût, le chic, l’élégance. Ce signe peut donc être perçu comme une revendication de qualité liée à l’origine géographique des produits qui seraient fabriqués à Paris ou par extension, en France ce d’autant, ainsi que le relève à juste titre le directeur général de l’INPI, que Paris et la France bénéficient d’une solide réputation dans le secteur de la mode et de la parfumerie qui sont des industries traditionnelles françaises. En conséquence, apposée sur des produits appartenant à ce secteur, l’expression FIER D’ETRE PARISIEN, présente un risque suffisamment grave de tromperie pour le consommateur qui pourrait être enclin à attribuer à ces produits une qualité ou une provenance géographique qui ne seraient pas les leurs. (CA Paris, pôle 5 ch. 2, 6 juin 2025, n° 24/02367)
  • Appréciation du risque de confusion. Dans le cadre d’un conflit opposant les marques et une marque figurative , le Tribunal retient que la configuration des marques est différente, en ce que la marque figurative antérieure est composée seulement de deux éléments, « president » et «’s », écrits en caractères majuscules gras noirs et en minuscule pour le « s », alors que la marque demandée est composée de l’élément verbal « always run », suivi par une tortue en mouvement, et de l’élément verbal « 4president », représenté de façon très stylisée. De plus, ces éléments verbaux sont séparés par une ligne noire épaisse et entourés de chaque côté par trois flèches pointant vers ces éléments. En outre, il convient de relever que l’éventuel caractère distinctif accru est dû à la marque figurative antérieure dans son ensemble et non au seul élément verbal « president », qui est faiblement distinctif, en ce qu’il véhicule un message laudatif selon lequel les produits en cause sont de bonne qualité et évoque une certaine autorité. Ainsi, si le caractère distinctif acquis par l’usage plus ou moins important d’une marque figurative est, certes, un élément qui peut être pris en compte pour apprécier si la similitude entre les signes ou entre les produits et les services est suffisante pour donner lieu à un risque de confusion, il n’est en revanche, dans le cas d’espèce, pas suffisant pour contrebalancer les différences entre les marques en conflit. Par conséquent, aucun risque de confusion ne saurait exister dans l’esprit du public pertinent. A supposer même que la marque figurative antérieure bénéficie d’un degré de caractère distinctif accru acquis par son usage, cette circonstance ne signifie pas que le public pertinent, bien qu’il ait un degré d’attention moyen et que les produits et les services en cause soient identiques ou similaires à des degrés divers, percevra objectivement moins les différences, notamment visuelles, entres les signes en conflit que la faible similitude visuelle qui résulte de la coïncidence dans l’élément verbal commun « president » des deux marques figuratives en conflit. (TUE, 4 juin 2025, T-726/24, Sven Benschop)

Brevet

  • Nullité du brevet. Extension du brevet au-delà de la demande. La pratique dite de la « généralisation intermédiaire » qui consiste à extraire une caractéristique isolée de son contexte spécifique, n’est justifiée qu’en l’absence de toute relation fonctionnelle ou structurelle clairement reconnaissable entre les caractéristiques de la combinaison spécifique ou si la caractéristique extraite n’est pas inextricablement liée à ces caractéristiques. En d’autres termes, une généralisation intermédiaire n’est autorisée en vertu de l’article 123(2) de la CBE que si la personne du métier reconnaît sans aucun doute, d’après la demande telle qu’elle a été déposée, que les caractéristiques tirées d’un mode de réalisation détaillé ne sont pas étroitement liées aux autres caractéristiques de ce mode de réalisation et qu’elles s’appliquent directement et sans ambiguïté au contexte plus général (V. chambre recours OEB, décision T 2489/13 du 18 avril 2018). La généralisation intermédiaire, pour être admissible, doit résulter clairement d’informations déductibles directement et sans ambiguïté par la personne du métier de la demande telle que déposée. Il apparaît ici que l’extraction de la caractéristique isolée selon laquelle le chiffrement a lieu dans la couche MAC du terminal et du réseau local sans fil, hors revendication de l’utilisation de l’algorithme WEP, alors que, pour la personne du métier, ces caractéristiques sont étroitement liées et que la seule caractéristique revendiquée ne s’applique pas directement et sans ambiguïté au contexte plus général de l’invention qui décrit le recours au protocole WEP, est donc une généralisation intermédiaire interdite constitutive d’une demande de protection s’étendant au-delà du contenu de la demande. (CA Paris, pôle 5 ch. 2, 13 juin 2025, n° 23/02588)

Dessins et modèles

  • Contrefaçon. La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021, qui a modifié l’article L. 122-5 du code de la propriété intellectuelle en précisant, au 12°, que l’auteur ne peut interdire la reproduction, l’utilisation et la commercialisation des pièces destinées à rendre leur apparence initiale à un véhicule à moteur, a redéfini, dans un sens favorable au prévenu, le champ de l’incrimination pénale tendant à la protection des droits d’auteur. Ne méconnaît donc pas l’article 112-1 du code pénal la cour d’appel qui applique immédiatement ces dispositions à des poursuites pour contrefaçon par atteinte aux droits d’auteur visant des faits commis antérieurement à leur entrée en vigueur. Les dispositions susmentionnées portent aux droits d’auteur une atteinte proportionnée au but légitime poursuivi, les travaux parlementaires établissant qu’elles ont pour objet de favoriser, par l’ouverture à la concurrence du marché des pièces détachées visibles, l’entretien et la réparation des véhicules automobiles afin d’éviter que ces derniers ne soient mis au rebut alors qu’ils pourraient continuer à rouler. Ne méconnaît donc pas l’article Ier du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme la cour d’appel qui juge que ces dispositions ne sont pas contraires au droit de propriété. Il en est de même pour les modifications que ladite loi a apporté à l’article L. 513-6 du code de la propriété intellectuelle en précisant, au 4°, que les droits conférés par l’enregistrement d’un dessin ou modèle ne s’exercent pas à l’égard d’actes qui visent à rendre leur apparence initiale à un véhicule à moteur et qui sont réalisés par l’équipementier ayant fabriqué la pièce d’origine. Par ailleurs, en interprétant ces dispositions comme étant applicables non seulement à l’équipementier d’origine, mais aussi à la chaîne commerciale existant entre lui et le consommateur, la cour d’appel leur a conféré leur exacte portée sans méconnaître le principe d’interprétation stricte de la loi pénale. (Crim., 11 juin 2025, n° 23-83.474, FS-B)
  • Caractéristique technique. A l’occasion d’une demande en nullité d’un DMC, portant sur la représentation d’un masque de plongée (), le Tribunal vient confirmer l’analyse de la chambre de recours qui a considéré, sur la base d’une appréciation globale de l’ensemble des éléments qui lui ont été soumis, que, au moins, la forme ovale du cadre du masque et la forme de la fixation de la sangle de tête du dessin ou modèle contesté participaient d’un choix esthétique du créateur et n’étaient pas exclusivement dictées par la fonction technique du masque en cause. Il ressort, par ailleurs, d’une comparaison entre le dessin ou modèle antérieur et le dessin ou modèle contesté que cet argument n’est pas fondé. En effet, c’est à bon droit que la chambre de recours a identifié des différences suffisamment marquées entre lesdits dessins ou modèles, notamment, la forme du cadre extérieur ovale dans le dessin ou modèle contesté, avec des lignes plus arrondies, mais aplati, alors que le dessin ou modèle antérieur, présente un aspect plus carré ou la sangle de tête en forme de « X », reliée par le milieu et fixée dans la partie inférieure du cadre dans le dessin ou modèle contesté, tandis que le dessin ou modèle antérieur présente une sangle très large, couvrant les oreilles et une grande partie du crâne. À celles-ci s’ajoutent d’autres différences, telles que la forme du capuchon du tuba, la présence d’une encoche sur le nez et la forme de la jupe intérieure. (TUE, 4 juin 2025, T-1060/23, Decathlon)

Protection des indications géographiques

  • Indication fausse ou fallacieuse. Rien n’interdit, par principe, qu’une marque puisse contenir ou consister en une AOP. Au contraire, il en découle qu’une marque contenant ou consistant en une AOP peut être enregistrée sous réserve de certaines conditions, en ce sens que l’enregistrement d’une telle marque est refusé ou annulé uniquement dans deux hypothèses, à savoir, premièrement, si l’AOP n’est pas conforme au cahier des charges du produit concerné ou, deuxièmement, si son utilisation relève de l’article 103, paragraphe 2, du règlement no 1308/2013 et concerne un produit relevant d’une des catégories répertoriées à l’annexe VII, partie II, de ce règlement. (…)
    La chambre de recours était tenue de considérer, à l’issue d’une appréciation globale des éléments de preuve fournis par les requérants, que ceux-ci étaient suffisants pour démontrer que le terme « nero » pourrait être perçu comme évoquant soit le cépage du champagne, soit sa couleur, de sorte que, pour, à tout le moins, une partie du public pertinent, la marque demandée pourrait être perçue comme véhiculant une indication fausse ou fallacieuse au sens de l’article 103, paragraphe 2, sous c), du règlement no 1308/2013. Dans ces conditions, il y a lieu, par réformation de la décision attaquée, d’annuler la décision de la division d’opposition dans la mesure où celle-ci a rejeté l’opposition à l’enregistrement de la marque demandée et d’accueillir ladite opposition pour les produits et services en cause. (TUE, 25 juin 2025, T‑239/23, Comité interprofessionnel du vin de Champagne et Institut national de l’origine et de la qualité (INAO) / EUIPO – Nero Lifestyle Srl)

 

par Yann Basire, Maître de conférences et Directeur général du CEIPI, Université de Strasbourg, et Stéphanie Le Cam, Maître de conférences, Université Rennes 2

© Lefebvre Dalloz