Rapport annuel 2023 de l’ACPR : l’assurance française, rassurante et prospère

Dynamique, rentable, robuste : ainsi se présentait le secteur de l’assurance, en 2023. Le rapport statistique annuel et sectoriel réalisé par l’ACPR sur « Les chiffres du marché français de la banque et de l’assurance en 2023 », rendu public le 24 octobre 2024, dévoile le nouveau record établi par le secteur de l’assurance en 2023, avec 20 milliards d’euros de résultat net.

La dynamique commerciale est bonne. La solvabilité des organismes d’assurance est qualifiée de « très confortable » avec un taux de couverture du capital de solvabilité requis (CSR) à 250 % fin 2023, retrouvant celui de 2021. Dans l’environnement économique perturbé de fin 2024, le portrait de ce secteur en 2023 est apte à rassurer.

Telle qu’elle se présente dans ses communiqués, « adossée à la Banque de France, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) est l’autorité administrative qui contrôle les secteurs de la banque et de l’assurance et veille à la stabilité financière. L’ACPR est également chargée de la protection de la clientèle des établissements contrôlés et assure la mission de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme. Elle est aussi dotée de pouvoirs de résolution » (sur la question, v. ex multi, T. de Ravel d’Esclapon, Le contrôle de l’ACPR, in R. Bigot et A. Cayol [dir.], Le droit des assurances en tableaux, préf. D. Noguéro, Ellipses, 2020, p. 92 s. ; B. Beignier et S. Ben Hadj Yahia, Droit des assurances, 4e éd., LGDJ, 2021, nos 70 s. ; L. Denis et K. Hocquerelle, Droit bancaire. Distribution et courtage en crédit, préf. A. Cayol et R. Bigot, 5e éd., Emerit Publishing, 2023, p. 438 s., nos 190 s. ; Y. Lambert-Faivre et L. Leveneur, Droit des assurances, 4e éd., Dalloz, coll. « Précis », n° 127).

Chaque année, l’ACPR livre un rapport statistique sectoriel. Le dernier en date, intitulé « Les chiffres du marché français de la banque et de l’assurance en 2023 », est paru le 24 octobre 2024, accompagné d’une conférence de presse et d’un communiqué de presse.

Complément au rapport annuel d’activité de l’ACPR, publié le 29 mai 2024, ainsi qu’à celui relatif à la protection des clientèles du 12 juin 2024, le rapport statistique annuel et sectoriel de l’ACPR présente les principaux chiffres du marché français de la banque et de l’assurance. À cet effet, l’ACPR collecte les principales données prudentielles et comptables auprès des établissements bancaires et des organismes d’assurance agréés qu’elle supervise, puis les synthétise et les diffuse dans ce document de référence.

Le contexte et la structure du marché

Des paramètres économiques critiques, en 2023. L’Autorité relève préalablement dans son communiqué que « Le début de l’année 2023 a été marqué par une rapide remontée des taux d’intérêt et de fortes tensions sur la stabilité financière tandis que le contexte géopolitique restait dégradé. Dans cet environnement peu favorable, le secteur financier français, à l’instar du secteur européen dans son ensemble, a fait preuve d’une grande solidité. En dépit d’une rentabilité qui s’érode, les fondamentaux du secteur bancaire français sont demeurés solides. (…) La situation prudentielle du système bancaire est demeurée robuste, la solvabilité ayant légèrement progressé de 0,4 point de pourcentage par rapport à 2022 » (ACPR, Communiqué de presse, 24 oct. 2024). Le secteur de l’assurance intéresse davantage cette rubrique dédiée du Dalloz actualité. Le communiqué de presse souligne, qu’en dépit du contexte de hausse (prononcée) des taux d’intérêt, de la sinistralité (assurance non-vie) toujours élevée et de l’inflation pesante sur les coûts, le secteur de l’assurance a également fait preuve de résilience. Les rapports annuels sectoriels affichent par principe d’excellents résultats. Aussi, d’une part, le discours de crise souvent invoqué par le secteur assurantiel laisse perplexe (J. Delayen, Rapport de l’ACPR sur le secteur de l’assurance en 2021 : vous avez dit crise ? Mais quelle crise ?, Dalloz actualité, 25 nov. 2022 ; J. Delayen, Rapport de l’ACPR : toujours pas de crise en vue dans le secteur de l’assurance !, Dalloz actualité, 9 janv. 2024). D’autre part, il est fort peu probable qu’un tel rapport annuel annonce publiquement une crise sectorielle, qui serait nécessairement passée, l’ACPR ayant pour missions de la prévenir et de la résoudre. Publié pratiquement à la fin de l’année civile suivante, le rapport annuel statistique sectoriel du superviseur de l’assurance présente une dimension rétrospective.

La concentration toujours croissante du marché de l’assurance. Alors que le nombre d’organismes d’assurance agréés en France s’élevait à 974 dix années auparavant, en 2013 précisément, leur nombre tombe à 660 entités fin 2023. La grande majorité (565 sur 660) de ces organismes d’assurance exerce sous un régime de solvabilité, dont 449 avec celui, plus exigeant, de Solvabilité II. 116 de ces organismes d’assurance exercent donc sous le régime de Solvabilité I (pour ceux relevant du code des assurances : art. L. 310-3-2), soit 20 % des organismes soumis aux règles de solvabilité et 0,15 % des primes totales. Depuis les années 1990, le mouvement de concentration des mutuelles ne s’affaiblit pas. Il se poursuit en 2023, avec 9 mutuelles de moins qu’en 2022. Le nombre d’institutions de prévoyance « est stable à 34 organismes et celui des sociétés du code des assurances connait une progression de 5 entités : le nombre de sociétés d’assurance diminue de 3 entités, mais l’Organisme de retraite professionnelle supplémentaire (ORPS) et 7 sociétés de réassurance supplémentaires ont été agréés en France en 2023, principalement des captives de réassurance. En effet, fin 2023, 15 captives sont agréées en France. Ces entreprises captives, créées par des groupes industriels ou commerciaux, se développent en France (+ 5 entités en 2023). Elles peuvent constituer, selon les modalités prévues par le décret 2023-449 du 7 juin 2023, une « provision pour résilience » en franchise d’impôt [CGI, art. 39 quinquies G] » (ACPR, Rapp. p. 84 et 86, pour l’évolution du nombre d’organismes depuis 2013). Environ 600 entreprises européennes d’assurance commercialisent des produits en France, au titre de la libre prestation de service, nombre stable après la forte chute de 2020.

Le bilan très positif des organismes d’assurance

Une classification des organismes d’assurance, interne à l’ACPR. Classiquement, l’enseignement présente l’assurance en deux grands domaines d’activités : les assurances de personnes et les assurances de dommages. Le professeur Robineau retient ainsi que « les assurances sont l’objet de multiples classifications, dont l’intérêt juridique est variable. La typologie examinée ici est fondée sur le risque couvert. Elle oppose les assurances de dommages pour lesquelles l’objet du risque est le patrimoine de l’assuré et les assurances de personnes pour lesquelles l’objet du risque est la personne même de l’assuré. Elle n’est pas totalement étrangère à la classification utilisée en matière d’agrément administratif et fait écho à la summa divisio par laquelle on distingue les choses et les personnes » (M. Robineau, Droit des assurances, 2e éd., Ellipses, 2024, p. 41 ; comp. S. Abravanel-Jolly, Droit des assurances, préf. B. Beignier, 4e éd., 2023, Ellipses, p. 15 s.). Les économistes privilégient la classification selon les différents risques, et non en fonction des activités, qu’ils indiquent également imparfaite (G. Bénéplanc, A. Charpentier et P. Thourot, Manuel d’assurance, 1re éd., PUF, coll. « Savoirs », 2022, p. 60 s.). Par ailleurs, « au sein des "assurances de personnes", la catégorisation réalisée par France Assureurs (nouvelle dénomination de la Fédération française de l’assurance depuis 2022) distingue entre : – les contrats "Épargne et retraite", c’est-à-dire les "assurances en cas de vie" et les contrats de capitalisation ; – les contrats "Santé et prévoyance" que sont les assurances en cas de maladie et d’accidents corporels et les assurances en cas de décès. En revanche, sous le terme "assurance-vie", cette fédération France Assureurs regroupe les assurances en cas de vie, les assurances en cas de décès et les contrats de capitalisation » (Mémento pratique, Patrimoine 2023-2024, Francis Lefebvre, 2023, n° 27950).

L’ACPR présente les chiffres du marché français de l’assurance en retenant une autre distinction : l’assurance non-vie et l’assurance-vie (ACPR, Rapp., p. 92 s.). Ces variations méthodologiques gênent les comparaisons et les croisements statistiques, donc, les enseignements tirés des données.

Un exercice 2023 perturbé en assurance-vie. L’assurance-vie enregistre la hausse de la collecte brute de 2,3 milliards d’euros. Le manifeste regain d’intérêt pour les supports en euros y participe fortement, conséquence probable de la hausse des taux. La concurrence des autres produits d’épargne (comptes à terme en particulier) demeure pourtant importante. En définitive, la progression des rachats et prestations a conduit l’assurance-vie à finir l’année 2023 en légère décollecte nette (- 2,3 milliards d’euros ; v. ACPR, Rapp., p. 116). Ce résultat a été effacé au 1er semestre 2024, avec l’augmentation exceptionnelle de 15,4 milliards d’euros de collecte nette (N. Aufauvre, Conférence de presse du 24 oct. 2024, Les chiffres du marché français de la banque et de l’assurance en 2023, Introduction). Tirée par le plan d’épargne retraite, la collecte nette atteint pour la deuxième fois en quinze années le seuil des + 2,5 milliards d’euros au mois de septembre 2024 (France Assureurs, communiqué de presse du 29 oct. 2024). L’actif prudentiel d’assurance-vie est investi à 20 % en obligations souveraines (dettes d’États), tout comme la moyenne des actifs. Plus de la moitié des placements (51,2 %) sont exposés géographiquement à l’économie française. Ces deux données ne varient guère, en regard de 2022. Les assureurs français détiendraient 16 % de la dette négociable de l’État français (France Assureurs, Les assureurs, moteur du financement de l’économie, sans date).

La rentabilité technique encore meilleure en assurance non-vie. Ce secteur de l’assurance non-vie affiche sa progression sur la plupart des lignes d’activité en 2023. Il améliore sa rentabilité technique globale, en dépit de la hausse de la sinistralité, concentrée dans l’assurance de catastrophes naturelles (« Cat Nat »). Cette dernière a vu ses sinistres augmenter de 37 % pour atteindre leur plus haut niveau depuis 2009, en répercussion des événements intervenus en 2022 et 2023 (orages de grêle, tempêtes, inondations). 

Les discours pessimistes sont à nuancer. En assurance non-vie, trois grands chiffres de l’année 2023 mettent en perspective les discours (trop) alarmistes quant au régime des catastrophes naturelles :

  • d’une part, les primes brutes en 2023 entrées dans les caisses des entreprises d’assurance, représentent 178,2 milliards d’euros ;
  • d’autre part, les sinistres bruts en 2023 représentent un montant total de 137 milliards d’euros, dont « seulement » 3,4 milliards d’euros pour les sinistres de catastrophes naturelles (ACPR, Rapp., p. 128). Rappelons qu’en principe, les entreprises d’assurance sont censées mutualiser les (nous soulignons) risques.

Plus précisément, en 2023, « les primes brutes en assurance non-vie sont en hausse de 5,3 % par rapport à 2022, alors que les sinistres non-vie bruts progressent dans une moindre mesure (+ 3,1 % : ils passent de 133,2 milliards d’euros en 2021 à 137,3 milliards d’euros en 2023 (ibid.). Par lignes d’activité, « les primes d’assurance de dommages corporels, qui représentent 49 % de l’ensemble des primes non-vie en affaires directes, augmentent de 6,2 %, passant de 59,8 milliards d’euros en 2022 à 63,5 milliards d’euros en 2023. Les primes d’assurance automobile et d’assurance de dommages aux biens, qui représentent respectivement 20 % et 17 % du marché, s’établissent à 25,8 milliards d’euros (+ 4,5 %) et 22,5 milliards d’euros (+ 7,3 %) en 2023. Seules les primes d’assurance-crédit et caution (0,8 % du marché) enregistrent une baisse (- 17,3 %), impactées par le ralentissement économique et du marché immobilier » (ibid.). La bonne tenue du volume global des primes d’assurance non-vie, en regard de sinistres d’ensemble maîtrisés, interroge la légitimité économique des augmentations des primes d’assurance imposées en 2024.

Les sinistres en affaires directes montrent leur légère augmentation dans certaines lignes d’activité entre 2022 et 2023, avec une légère diminution pour d’autres lignes. « Les dommages corporels, qui comptent pour plus de la moitié des sinistres d’assurance non-vie, enregistrent une hausse de 4,5 % pour atteindre 50,5 milliards d’euros. Les catastrophes naturelles voient aussi leur montant de sinistres augmenter (+ 37 % à 3,4 milliards d’euros) avec l’intensification et l’augmentation de fréquence des phénomènes climatiques extrêmes tels que les tempêtes Ciaran et Domingos en 2023, ainsi qu’avec l’inflation. Les sinistres en assurance-crédit-caution et en responsabilité civile générale, quoiqu’ayant un poids plus modeste, progressent également (respectivement + 14,5 % et + 12,0 %). Les catégories « construction » et « automobile » voient quant à elles leurs sinistres diminuer respectivement de 3,6 % et 1,9 % en 2023 après avoir enregistré une forte hausse en 2022 » (ibid.).

Le ratio sinistres à primes (S/P) pour l’ensemble de l’assurance non-vie est de 77 % en 2023. Mis à part le ratio sinistres à primes et le ratio combiné des catastrophes naturelles, « sur la période, les ratios de performance s’améliorent pour la quasi-totalité des lignes d’activité de l’assurance non-vie » (ibid.).

La bonne solvabilité affichée du secteur de l’assurance. La solvabilité des organismes d’assurance est en progression par rapport à 2022, pour l’ensemble du marché. Elle ressort comme confortable avec un taux moyen de couverture du capital de solvabilité requis (C. assur., art. L. 352-1 et R. 352-1) à 250 % fin 2023, retrouvant le niveau de 2021. Ce ratio, divisant une partie des fonds propres (ceux « éligibles ») par le capital nécessaire à la couverture des risques, doit dépasser 100 % pour que le capital mobilisable puisse éponger la survenance éventuelle de risques, notamment des pertes exceptionnelles (ACPR, Rapp., p. 108 et 109 et notes méthodologiques, p. 154 et 155). Le niveau atteint est inférieur à la moyenne de l’Union européenne. Des différences de solvabilité apparaissent, selon le type d’organismes. Les assureurs vie et mixtes et les filiales de bancassurance (i.e. les bancassureurs) voient leurs taux de couverture du CSR augmenter de respectivement 11 et 10 points entre 2022 et 2023, alors que les organismes d’assurance non-vie voient leur ratio de solvabilité s’établir à 277 % en 2023, après 282 % en 2022. (…) En ce qui concerne les bancassureurs, c’est la diminution du CSR (dénominateur) qui entraine une augmentation du ratio de solvabilité agrégé, les fonds propres étant stables entre 2022 et 2023. (…) La diminution du ratio de solvabilité des organismes d’assurance non-vie est quant à elle portée par le module souscription non-vie du CSR. Le montant des exigences de ce module passe de 19 milliards d’euros en 2022 à 22 milliards d’euros en 2023 pour les organismes non-vie (…). Cette augmentation du dénominateur induit une diminution du ratio de solvabilité des organismes d’assurance non-vie entre 2022 et 2023. En outre, la part des exigences au titre du module de souscription non-vie dans le calcul du CSR des organismes non-vie passe de 50 % en 2022 à 52 % en 2023 » (ACPR, Rapp., p. 108 s., spéc. p. 108). Mme Aufauvre, secrétaire générale de l’ACPR, commente qu’« En 2024, le secteur financier devrait bénéficier du reflux de l’inflation et de l’assouplissement monétaire. Toutefois, dans un contexte de tensions géopolitiques persistantes, d’incertitudes macroéconomiques et de montée progressive du coût du risque, l’ACPR maintient sa vigilance sur la qualité des actifs financiers et la rentabilité des établissements » (N. Aufauvre, Conférence de presse du 24 oct. 2024, Les chiffres du marché français de la banque et de l’assurance en 2023, Conclusion). En matière de solvabilité, ou de résistance des entreprises de banque ou d’assurance à des chocs puissants, comme l’a montré la crise (bancaire) de 2008, une forte partie des résultats dépend étroitement des modèles de calcul utilisés, ainsi que de leurs paramètres, notamment de projections de crises.

La rentabilité globale encore en progression. 2022 affichait déjà une rentabilité rarement égalée : « Le chiffre d’affaires global du secteur de l’assurance est en légère hausse, passant de 328 Mds en 2021 à 329,7 Mds d’euros en 2022. En nombre relatif, cela donne une augmentation de 0,5 % du chiffre d’affaires global. En nombre absolu, c’est presque 2 Mds d’euros de résultat supplémentaire ! (…). Il n’en reste pas moins que le résultat technique (c’est-à-dire le résultat de l’opération suivante : [Primes perçues] – [Charges des sinistres] – [Participation aux résultats] + [Produits financiers nets] – [Frais d’acquisition et d’administration] + [Autres produits et charges] ; v. Rapp., p. 133) est en hausse (passant de 13,7 Mds à 14,9 Mds) pour aboutir à un résultat net jamais égalé jusqu’à présent de 17,1 Mds d’euros (contre les 12 Mds de l’année 2021). Si le chiffre d’affaires n’augmente pas significativement, c’est bien la rentabilité des entreprises d’assurance qui s’accroît sensiblement, comme l’illustre l’augmentation du rendement des fonds propres (RoE) (passant de 6 % à 7,1 % et renouant ainsi avec les années 2013 à 2019). En témoigne plus spécifiquement le secteur de l’assurance vie qui, bien qu’enregistrant un chiffre d’affaires moindre, termine avec un résultat technique de 9 Mds d’euros, en hausse par rapport au 8 Mds de l’année 2021. De même, le résultat net des sociétés d’assurance-vie et mixte est en hausse de 61 % en 2022 (passant à 11,1 Mds contre les 7 à 8 Mds généralement constatés ces dernières années) » (J. Delayen, Dalloz actualité, 9 janv. 2024). 

Le chiffre d’affaires global explose encore en 2023, avec 16 milliards d’euros supplémentaires. En effet, « En 2023, le chiffre d’affaires du marché de l’assurance s’établit à 344 milliards d’euros, en progression de 4 % par rapport à 2022. En assurance non-vie, le chiffre d’affaires connaît une hausse de 5,3 % par rapport à 2022 et s’établit à 178 milliards d’euros en 2023. En assurance vie, les primes progressent de 2,7 % par rapport à 2022 et atteignent 166 milliards d’euros en 2023, un niveau toutefois inférieur à celui de 2021 (172 milliards d’euros). Cette croissance est principalement alimentée par l’assurance de dommages corporels » (ACPR, Rapp., p. 140). Le rapport ne diffuse aucune information relative à la distribution, notamment la part prise par les intermédiaires d’assurance ou celle de la vente directe à distance, spécialement en ligne.

Outre une année commerciale tonique, « la dynamique des marchés financiers a permis de dégager des produits financiers nets, à hauteur de 78 milliards d’euros en 2023, après des pertes financières de 16 milliards d’euros en 2022. Les ajustements des contrats à capital variable voient ainsi leur situation passer d’une moins-value de 57 milliards d’euros en 2022 à une plus-value de 33 milliards d’euros en 2023 » (ibid.). En outre, « le résultat technique pour l’ensemble des organismes est en hausse de 4,8 % par rapport à 2022 et atteint 16 milliards d’euros en 2023. Le résultat net du marché de l’assurance, en hausse de 16,8 % sur l’année, s’établit à 20 milliards d’euros, après 17 milliards d’euros en 2022. Cette progression est principalement portée par le résultat net des organismes de réassurance et des holdings qui passe de 3 milliards d’euros à 6 milliards d’euros sur la période. Les résultats nets des sociétés d’assurance vie et mixtes d’une part et non-vie d’autre part sont stables, respectivement à 8 milliards d’euros et 5 milliards d’euros » (ibid.). 

En 2023, le résultat net atteint un nouveau record de 20 milliards d’euros, alors qu’il était déjà inégalé à 17,1 milliards en 2022 (ACPR, Rapp., p. 141) ! « C’est ainsi que les assureurs ont pu, en 2022, "dégag[er] un résultat net en forte progression (17,1 Mds d’euros, + 5 milliards par rapport à 2021)" (ACPR, préc.) soit le résultat net le plus élevé relevé ces quinze dernières années (et confirmant la tendance haussière de ce résultat net observée depuis 2013, première année où le résultat net passe au-dessus de la barre des 10 Mds d’euros) » (J. Delayen, Dalloz actualité, 9 janv. 2024, préc.). En conséquence, en 2023, « le rendement des fonds propres (RoE) des organismes d’assurance dans leur ensemble s’élève à 8,2 %, soit une hausse de 1,1 point par rapport à 2022 » (ACPR, Rapp., p. 140).

Le rapport statistique et sectoriel annuel 2023 de l’ACPR brosse une nouvelle fois le portrait rassurant du secteur de l’assurance. Le total de bilan des organismes d’assurance français est le premier de l’Union européenne (avec 2 872 milliards d’euros, en 2023). Un seul assureur français est d’importance systémique mondiale (Conseil de stabilité financière, Insurers Subject to Resolution Standards, 5 déc. 2024) ; une bonne partie des assureurs français sont des filiales de banques qui ont rang d’établissements d’importance systémique mondiale (Conseil de stabilité financière, List of Global Systemically important Banks, 26 nov. 2024). La qualité de la gouvernance de ces entreprises d’assurance (C. assur., art. L. 354-1 ; ACPR, Mise en place des nouvelles règles de gouvernance dans le secteur de l’assurance : bilan et perspectives », juill. 2020), facteur potentiel de risque ne faisant pas l’objet de mesures statistiques, échappe au tableau. Le rapport traite modérément de l’évolution des natures des menaces ou de celles des méthodes encadrant la production des données comptables et prudentielles. La « numérisation de l’économie » suscite de nouveaux risques, notamment celui d’attaques « cyber » et pousse à adapter le cadre de supervision (ACPR, Conférence annuelle, 26 nov. 2024), y compris dans sa dimension statistique.

 

ACPR, Rapport statistique annuel 2023, 24 oct. 2024

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