Sur l’Île de la Cité, le démontage de la salle d’audience temporaire des grands procès vient de débuter
Cette salle d’audience avait été construite pour accueillir le procès des attentats du 13 novembre.
Une nouvelle page d’histoire se tourne au vénérable Palais de Justice de Paris. L’Agence publique pour l’immobilier de la justice (APIJ) vient en effet de lancer le chantier du démontage de la salle d’audience temporaire. Mise en place avant le procès des attentats du 13 novembre 2015, elle est installée dans une partie de la salle des pas perdus. Un chantier dont la principale contrainte était de ne pas percer de trous dans des parties visibles, obligeant à passer par un système de 92 points d’ancrage sous le niveau du sol. La déconstruction des cloisons et du mobilier de cette salle de 750 m² environ doit désormais durer jusqu’en septembre prochain, six mois plus tard.
Ce mardi 18 mars, une quinzaine d’ouvriers s’affairent. Du passé judiciaire de la salle, il reste ce box des accusés, vide. Ou encore cette feuille A4, oubliée sur un plan de travail. « Conclusions parties civiles et pièces, 4 liasses dossier attentat de Strasbourg », peut-on y lire. Outre ce procès et celui de « V13 », l’attentat de Nice – en première instance et en appel –, le dossier du Mediator en appel, l’évasion de Rédoine Faid, le projet d’attentat déjoué pendant la campagne présidentielle de 2017, les attaques terroristes du 23 mars 2018, le procès de Peter Cherif, l’assassinat de l’enseignant Samuel Paty, l’attentat de la rue Apert et un dossier de criminalité organisée ont été jugés en ces murs. Comme le rappelle le ministère de la Justice, le démontage de la salle avait été initialement prévu pour 2023. Ce chantier avait finalement été reporté au premier semestre 2025 à la demande de la Cour d’appel de Paris. La juridiction « souhaitait pouvoir profiter de cette installation pour y tenir d’autres procès d’envergure ».
Réemploi et mémoire
Après les réseaux multimédias, les bancs ont déjà commencé à être démontés. Avec précaution : le ministère de la Justice veut faire de ce chantier celui du réemploi. Une partie du mobilier, des bancs et des tables d’avocats, va ainsi partir pour les Tribunaux d’Amiens, de Beauvais et de Toulouse. Tandis que les équipements de retransmission (caméras, micros et écrans) et de sûreté vont rester sur l’Île de la Cité. Ils doivent équiper la nouvelle salle de retransmission prévue dans le hall Bertillon.
Plusieurs pièces de la salle d’audience sont destinées également à rejoindre le Musée-mémorial du terrorisme, qui doit être installé d’ici quelques années au Mont-Valérien. Le futur établissement devrait pouvoir obtenir les très symboliques balance de la justice, la barre des témoins et l’enseigne lumineuse de la salle, ainsi que quelques bancs. Enfin, les plafonds, murs en placo, luminaires ou encore la structure en acier doivent être revendus par lots. Le coût du démontage est évalué à un million d’euros, une somme à comparer aux dix millions d’euros alloués à la construction, qui avait duré un an environ. Toutefois, les équipements qui vont être réutilisés, comme ceux de visioconférence, suggèrent que la facture réelle est en réalité un peu moins élevée.
Rénovation
Ce démontage n’est toutefois qu’une « première étape » dans la restauration d’une partie du Palais de Justice, rappelle Marion Daubersies, directrice de programme de l’APIJ. Un chantier qui concerne l’ensemble dit « B5 ». Soit la partie comprise entre le quai de l’Horloge et la cour du Mai – on y trouve la salle des pas perdus, des salles d’audience civiles et des bureaux.
Les travaux, qui vont permettre la réfection du bâtiment, sa consolidation et sa mise aux normes incendie, devraient durer jusqu’en 2030. Une huitième salle d’audience va également être créée tandis que la salle des pas perdus va retrouver son rôle de desserte des salles attenantes. Ils vont s’accompagner enfin de prometteuses fouilles archéologiques sur le site. Le vaste chantier de rénovation du Palais de Justice avait commencé par la modernisation des locaux des laboratoires de la police scientifique en 2021. Il s’était poursuivi avec la rénovation du 36 quai des Orfèvres. Après 2030, le projet se poursuivra au niveau du secteur qui donne sur la place Dauphine.
Quant à la création d’une nouvelle salle pour de futurs grands procès, les études sont toujours en cours, signale Philippe Monnot, le chef du service de l’immobilier ministériel. Le ministère de la Justice mise en attendant sur les trois grandes salles du Palais. Elles peuvent accueillir jusqu’à 350 personnes assises, avec en cas de besoin la possibilité d’une retransmission à distance. « Il faut trouver le bon équilibre », rappelle Philippe Monnot. Hormis le procès du 13 novembre, qui s’est déroulé de septembre 2021 à juin 2022, le prétoire temporaire de 550 places n’a plus vraiment fait salle comble.
© Lefebvre Dalloz