TMS Pros : une démarche de prévention qui va bien au-delà des troubles physiques
Les troubles musculo-squelettiques sont un des risques professionnels majeurs en France. Des programmes existent pour prévenir cette famille de risques, notamment la démarche « TMS Pros » animé par les Carsat. Précisions et témoignages issus du salon Preventica Toulouse.
Alors que des préventeurs et institutions appellent à inscrire l’écoute des salariés comme nouveau principe de prévention, certains projets concrets permettent de mettre en œuvre ce principe pour améliorer concrètement les conditions de travail. C’était le sens du témoignage de l’entreprise Compass, suite à sa participation au programme TMS pros, lors du salon Preventica Toulouse le 20 septembre dernier.
Pour cet atelier, la Carsat Midi-Pyrénées avait invité à la fois la responsable RH (Delphine Knowles) et un membre de la CSSCT (Guillaume Escudié) pour un retour d’expérience croisé.
Les TMS, toujours un enjeu majeur
Pour démarrer, Eric Bouschbacher, responsable formation à la Carsat rappelle que les TMS touchent tous les corps de métier et ont des conséquences à tous les niveaux. Première cause de maladie professionnelle en France, les TMS impactent l’absentéisme des travailleurs et la hausse des cotisations AT/MP.
Mais elles ont aussi des conséquences sur l’ambiance de travail et le climat social qui peuvent se dégrader, l’organisation du travail et la productivité ou encore les difficultés à recruter, soit la performance globale, et la pérennité des entreprises. En moyenne, les arrêts de travail durent 2 mois, et les TMS au niveau de l’épaule et du canal carpien provoquent des absences de longue durée.
Les parties du corps concernées sont principalement les poignets-mains-doigts (38 %), les épaules (30 %) et les coudes (22 %).
TMS Pros, un programme collaboratif et concret
Face à ces constats, l’Assurance maladie-risques professionnels porte un programme national « TMS pros » (cf. encadré) avec lequel plus de 7500 entreprises ont déjà été accompagnées. Celles-ci sont ciblées pour leur sinistralité TMS. Cela a été le cas de l’entreprise Compass qui a reçu un courrier qui a déclenché « beaucoup d’appréhension au départ », selon la responsable RH, qui a ensuite vu ce programme comme une opportunité.
Le diagnostic initial a montré un engagement de la direction plutôt bon, mais une marge de progrès significative en termes de compétences sur les TMS. La responsable RH n’a pas souhaité faire appel à un consultant externe mais a choisi de monter un groupe de projet en interne, dans le but de progresser de manière collective sur le sujet.
Ainsi, le formateur-ergonome est intervenu avec les salariés pour faire les diagnostics et faire monter les travailleurs en compétence. La responsable RH avait une « volonté forte d’impliquer les collaborateurs ». Mission accomplie ? A entendre le représentant du personnel, oui, puisqu’il a constaté une implication de tous ses collègues. Il appuie (et salue) le fait que c’est le travail réel qui a été observé et discuté. De plus, selon lui, ce qui a motivé les équipes, c’est le fait que « c’est un projet qui est bien cadré avec des résultats à la fin, et des choses très concrètes ».
Balance mobile, chariot adapté, couvercles alimentaires
Citons un premier exemple : l’entreprise Compass fournit des repas à des patients d’hôpitaux qui ont des régimes médicaux, ainsi des grammages très précis doivent être respectés par assiette. La balance utilisée pour chaque plat était surélevée par rapport au niveau des épaules (300 patients = 300 gestes). Une balance mobile a été fixée devant et au niveau du plan de travail, ce qui a permis d’éliminer le geste problématique.
Le représentant du personnel rappelle que les travailleurs « connaissent mieux que nous les gestes au quotidien. Ce sont eux qui ont des idées pour améliorer les tâches ». Un salarié a par exemple proposé et conçu un nouveau chariot pour transporter des casiers, sans devoir tous les empiler à la verticale bien au-delà du niveau des épaules.
Autre exemple : l’entreprise, qui est soumise à des règles d’hygiène stricte, a remplacé les films alimentaires sur les plats par des couvercles, ce qui rend la manutention moins difficile. Et, côté environnemental, ce changement n’aggrave pas l’impact puisque les mêmes machines à laver sont utilisées sans davantage d’eau ou d’énergie.
Des managers plus impliqués
L’audit final du projet a montré une nette amélioration sur de nombreux critères, notamment sur la « recherche d’autonomie dans la démarche de prévention des TMS » et la « participation des salariés de l’encadrement et des représentants du personnel ». Sur ce dernier point, la responsable RH note que depuis ce projet, « les travailleurs sont beaucoup plus dans l’échange avec leur direction pour proposer leurs idées ». Si certains sujets nécessiteraient de gros projets, il y a parfois des actions réalisables, comme incliner davantage la chaîne des plateaux. Ainsi, le salarié n’a plus besoin de « se coucher » sur le rail pour débloquer les plateaux, ceux-ci descendent tout seuls.
Les TMS étant davantage un facteur de maladie professionnel (et moins d’accidents), les indicateurs classiques de SST n’ont pas forcément bougé. Mais, RH et RIP s’accordent pour constater que les manager sont plus impliqués, et que cette action a permis aussi d’agir en prévention des RPS. De quoi donner envie à d’autres entreprises de se lancer. C’est faisable car tous les outils du programme TMS Pros sont accessibles en ligne.
|
Le programme TMS Pros |
|---|
|
Cette démarche a 2 objectifs : réduire les effets de l’exposition aux risques des TMS et rendre les entreprises autonomes fac à ce risque. Elle est structurée en 4 étapes : diagnostic initial (en quoi suis-je concerné ?), définition et hiérarchisation des premières actions et mesures techniques ou organisationnelles (par quoi commencer ?), analyse des résultats (est-ce que la démarche a été efficace » ? comment corriger et améliorer ?). Ce programme nécessite des compétences. Deux solutions existent : une montée en compétence en interne, ce qui a l’avantage d’être durable et pérenne ou s’appuyer sur des compétences externes (plus rapide mais cela dépend des disponibilités). Le programme cible 3 types de publics avec des objectifs différents : le dirigeant (qui doit comprendre les enjeux, initier et piloter le projet dans son entreprise), l’animateur sui coordonne la démarche et doit être formé) et les salariés qui doivent devenir acteurs de ka la prévention. Des aides financières sont également à disposition des TPE. |
© Lefebvre Dalloz